PROCEDE DE GRAVURE D'UNE LENTILLE

La présente invention se rapporte à un procédé de gravure d'une lentille, notamment pour application ophtalmologique.

Les lentilles sont usuellement gravées afin de faire figurer, sur une de leur surface, des marques permettant par exemple d'assurer leur traçabilité ou de faciliter le montage, notamment pour équiper des montures de lunettes. De telles marques peuvent consister en des signes alpha-numériques, des logos ou des figures géométriques .

A titre d'exemple, on peut citer les marques géométriques inscrites sur les surfaces de verres progressifs comprenant une croix de vision de loin, un point central correspondant au centre optique où le prisme du verre peut être mesuré, un cercle situé dans la partie inférieure du verre qui matérialise le centre de la vision de près, un cercle de mesure de la puissance de vision de loin du verre, un ou plusieurs traits repérant l'horizontale du verre qui sont utilisés pour le centrage. Ces marquages sont le plus souvent provisoires et peuvent être effacés par l'opticien avant la remise des lunettes au client. En général, d'autres marquages sont permanents et subsistent sur le verre après montage, tels que par exemple deux ronds ou signes localisés sur l'horizontale du verre passant par le centre optique, un signe permettant d'identifier la marque et la nature du verre, un nombre à 2 ou 3 chiffres représentant la valeur de l'addition (par exemple 300 pour une addition de 3,00 D) .

Les procédés de gravure communément utilisés mettent en œuvre en général soit des outils abrasifs, soit

un laser. La gravure par laser, bien que très efficace pour graver des lentilles en polymères, présente l'inconvénient d'être coûteuse, peu flexible, et nécessite la fabrication préalable de masques. Elle est peu adaptée à la production de petites séries. En conséquence, il existe toujours un besoin important de perfectionner les techniques de gravure mécanique des lentilles.

Il est connu, par exemple du document DE 35 34 920 Al, de mettre en œuvre un dispositif de gravure d'une lentille en verre ou en polymère permettant à un outil abrasif de se déplacer sous charge sur la surface d'une lentille en suivant une trajectoire discontinue résultant d'oscillations perpendiculaires à la surface de la lentille, à une fréquence de 30 à 40 kHz, de l'outil. Cette solution, bien que permettant de limiter l'usure de l'outil, présente des inconvénients liés aux impacts répétés de l'outil à la surface de la lentille qui peuvent créer des amorces de rupture et ainsi fragiliser la lentille après gravure. Le but de la présente invention est de remédier aux inconvénients ci-dessus et de proposer un procédé de gravure mécanique qui n'endommage pas la surface de la lentille tout en permettant d'obtenir une gravure distincte et susceptible d'être préservée en cas de traitement ultérieur de la lentille.

Ce but est atteint par un procédé de gravure d'une lentille en polymère où l'on déplace sous charge un outil abrasif sur une surface de la lentille et où l'outil abrasif suit une trajectoire continue comprenant des boucles.

On entend par « trajectoire continue », un déplacement de l'outil abrasif sur la surface du verre où

une charge est maintenue tout au long du déplacement. Cette charge peut ne pas être constante tout au long du déplacement, mais elle doit rester suffisante pour produire un sillon continu à la surface de la lentille. On entend par « trajectoire comprenant des boucles », un déplacement de l'outil abrasif sur la surface du verre avec des parties de trajectoire qui reviennent à un point déjà parcouru.

Les boucles sont avantageusement des boucles essentiellement courbes, notamment circulaires. A titre d'exemple, une courbe stropholde constitue une des boucles selon l'invention.

Grâce à la trajectoire ainsi définie, il est possible d'obtenir une gravure parfaitement nette à la surface d'une lentille. En outre, les inventeurs ont pu observer qu'une telle gravure est mieux préservée lors de traitements ultérieurs de la lentille que les gravures connues .

Selon des modes de réalisation de l'invention, pris séparément ou en combinaison

- les boucles sont périodiques ; la trajectoire comprend entre 2 et 20 boucles par mm ;

- la largeur des boucles est comprise entre 0,05 mm et 1 mm, par exemple entre 0,1 et 0,3 mm ; la largeur de l'empreinte laissée par l'outil abrasif sur la surface de la lentille est comprise entre 0,05 et 0,2 mm, par exemple environ 0,1 mm ; la charge appliquée à l'outil abrasif est comprise entre 0,1 N et 5 N ;

- l'outil abrasif est en rotation autour de son axe pendant son déplacement sur la surface de la lentille ; de préférence, l'outil tourne à une vitesse de rotation de 50 à 2500 tours par minute autour de son axe ; - le polymère à graver est un polymère thermoplastique, par exemple un polycarbonate ou un polymère thermodur, par exemple un CR 39 ;

- l'outil abrasif comprend une extrémité abrasive sensiblement hémisphérique ; - l'extrémité abrasive de l'outil abrasif est constituée d'une concrétion diamantée ;

- l'outil abrasif comprend un cône dont l'angle a est compris entre 50 et 70 degrés, par exemple environ 60 degrés, à l'extrémité duquel est fixée l'extrémité abrasive.

Le déplacement de l'outil est aisément motorisé et paramétrable, grâce à, par exemple, deux moteurs induisant des déplacements dans deux axes perpendiculaires.

L'invention concerne également un procédé de fabrication d'une lentille en polymère comprenant une étape de gravure de la lentille avec les caractéristiques du procédé de gravure ci-dessus et au moins une étape ultérieure qui comprend une montée en température à une température supérieure à la température de transition vitreuse (Tg) du polymère de la lentille.

Les inventeurs ont pu en effet constater qu'alors que les gravures mécaniques connues s'estompent voire disparaissent ou que des défauts de surface se développent quand on porte une telle lentille à une température supérieure au point de transition vitreuse du matériau qui la constitue, les lentilles gravées selon l'invention

conservent beaucoup mieux leur gravure après un tel traitement .

Sans vouloir être liés par une quelconque théorie, on peut penser que le fait que l'outil abrasif suive une trajectoire comprenant des boucles permet un arrachement de matière plus profond aux points parcourus plusieurs fois . On peut également penser qu'une gravure conventionnelle produit des sillons dont les bords sont relevés par rapport à la surface initiale de la lentille et que la matière déplacée a tendance à fluer et à reboucher les sillons quand on porte la lentille à une température supérieure à la température de transition vitreuse du polymère de la lentille. Dans le cas de l'invention, on peut penser que les sillons sont, au moins dans les zones d'intersection de la trajectoire avec elle-même, moins facilement comblés par le fluage du polymère.

Selon un mode de réalisation du procédé de fabrication d'une lentille, l'étape ultérieure comprenant une montée en température au-delà de Tg est une étape de coloration où la lentille est plongée dans un bain de coloration, par exemple à une température comprise entre 100 ⁰ C et 150 ⁰ C, par exemple environ 120 ⁰ C.

L'invention sera détaillée ci-après à l'aide d'exemples non limitatifs illustrés par les figures suivantes :

Figure 1, a et b : vue schématique de trajectoires selon l'invention.

Figure 2 : vue schématique d'un outil abrasif utilisé pour mettre en œuvre l'invention. Pour des raisons de clarté, les dimensions des différents éléments représentés dans les figures ne sont pas en proportion exacte avec leurs dimensions réelles. Sur

toutes les figures, des références identiques correspondent à des éléments identiques.

La figure 1 présente un exemple d'empreinte 1 laissée par un outil sur une lentille, en suivant des trajectoires selon l'invention. Le motif correspond à la lettre « e » partiellement entourée. L'empreinte est continue. Dans les exemples réalisés, la taille de la lettre « e » est d'environ 1,5 mm en hauteur et en largeur. La largeur de l'empreinte est d'environ 0,1 mm. La largeur des boucles 2 est comprise entre 0,1 et 0,2 mm.

Dans l'exemple de la figure la, le nombre de boucles au mm est d'environ 5, alors qu'il est d'environ 2 à 3 dans l'exemple de la figure Ib.

L'outil abrasif est maintenu en rotation autour de son axe pendant les phases de gravure à une vitesse de 750 tours par minute et la vitesses d'avance en X et Y de 3mm/s .

Des gravures sur des lentilles en CR39 - polymère thermodur connu de l'homme du métier dans le domaine ophtalmique - ont été réalisées suivant ces motifs. Les lentilles ainsi gravées ont ensuite subi une étape de coloration par trempage dans un bain de coloration à environ 120 ⁰ C. A la différence des lentilles gravées par les méthodes mécaniques connues, les lentilles ainsi gravées présentaient une gravure parfaitement visible et lisible après traitement de coloration. On rappelle pour mémoire que la température de transition vitreuse d'un CR39 est d'environ 8O ⁰ C.

La figure 2 représente une vue schématique d'une partie de l'outil 10 utilisé pour procéder à la gravure des lentilles décrites ci-dessus. L'outil 10 comprend une extrémité abrasive 12 constituée d'une concrétion diamantée

dont la taille des grains est par exemple de l'ordre de 4 μm. Cette extrémité abrasive 12 est fixée à l'extrémité d'un cône en acier dont l'angle a a une valeur d' environ 60° . Grâce à cet outil et à la trajectoire utilisée, il a été possible de graver 1500 lentilles avec un même outil, sans que ce dernier ne paraisse aucunement dégradé, avec des motifs dont la précision et la qualité sont préservées. Il aurait été possible de poursuivre la gravure d'autres lentilles avec le même outil.

L'invention ne se limite pas à ces types de réalisation et doit être interprétée de façon non limitative en englobant tout mode de réalisation équivalent .