La présente invention concerne un procédé de modification d'ouvrage de génie civil faisant appel à des techniques de sols renforcés, par exemple d'un ouvrage en remblai renforcé.

Les ouvrages concernés par l'invention peuvent avoir des usages variés comme par exemple des voies de circulation, étendre un espace constructible, prévenir la détérioration, l'érosion ou la chute de pierres de murs ou de parois rocheuses, ou encore créer un massif esthétique.

Un ouvrage en sol renforcé associe généralement un remblai compacté, un parement et des renforcements ou éléments de stabilisation connectés au parement. Les éléments de stabilisation sont mis en place dans le sol avec une densité dépendant des contraintes pouvant s'exercer sur l'ouvrage, les efforts de poussée du terrain étant repris par le frottement sol-renforcement.

Le parement est le plus souvent réalisé à partir d'éléments préfabriqués en béton, en forme de dalles ou de blocs, juxtaposés pour recouvrir la face frontale de l'ouvrage. II peut y avoir des décrochements horizontaux sur cette face frontale entre différents niveaux du parement, lorsque l'ouvrage comporte une ou plusieurs terrasses.

Les éléments de stabilisation placés dans le remblai sont habituellement solidarisés au parement à l'aide d'organes de connexion mécaniques pouvant prendre diverses formes. Une fois l'ouvrage terminé, les éléments de stabilisation répartis dans le remblai transmettent des charges élevées, pouvant aller jusqu'à plusieurs tonnes. Leur connexion au parement doit être robuste pour conserver la cohésion de l'ensemble. Bien que ces ouvrages en sol renforcé soient très robustes et performants, il arrive qu'à l'usage, on se rende compte qu'il est nécessaire d'opérer des modifications de l'ouvrage.

Par exemple, un ouvrage destiné à soutenir initialement quatre voies de circulation peut avoir besoin d'être modifié afin de permettre la mise en place de six voies de circulation.

Il peut également arriver qu'avec le temps, le parement se dégrade, par exemple en raison d'une utilisation de l'ouvrage non-prévue initialement ou encore en raison d'un défaut dans la fabrication du parement.

Les éléments de parement en béton peuvent souffrir de pathologies du béton. Parmi les pathologies du béton connues de l'homme du métier qui peuvent conduire à un gonflement des éléments de parement, on peut citer par exemple des réactions alcalines se produisant au sein du béton ou des réactions sulfatiques internes.

Le gonflement interne des cristaux peut conduire à la fissuration puis à la fragmentation progressive du béton composant le parement. Ce gonflement peut prendre place sur plusieurs mois ou plusieurs années. Cependant, il n'est pas détectable au moment de la construction de l'ouvrage et ce gonflement peut également être accéléré par des conditions climatiques défavorables.

Les éléments de parement d'un ouvrage en sol renforcé jouent un rôle important dans la stabilisation de l'ouvrage. De plus, ces éléments de parement jouent également un rôle architectonique .

En cas de pathologies irrémédiables ou de dégradations des éléments de parement, il s'avère parfois nécessaire de restituer le rôle mécanique du parement en procédant à une réparation . Actuellement, les solutions de réparation consistent essentiellement à remplacer des éléments de parement endommagés ou dégradés.

Les procédés actuellement connus de l'homme du métier comprennent généralement les étapes suivantes :

- on stabilise le remblai par injection d'un béton à l'arrière de l'élément de parement,

- on prédécoupe l'élément de parement,

- on le retire fragment par fragment et

- on coule en place un nouvel élément de parement ou on remplace l'ancien élément de parement par un élément préfabriqué .

Le remplacement des éléments de parement un à un est un processus long, minutieux et qui présente des risques. En particulier, pour les ouvrages de grande taille, il est nécessaire de réaliser une stabilisation préliminaire par exemple par injection de coulis ou de résine dans le matériau de remblai à l'arrière des éléments de parement. En effet, il existe un risque d'éboulement ou d'érosion lors de l'opération de retrait de l'élément de parement.

Ainsi, il existe un besoin pour un procédé permettant de réparer et/ou de modifier un ouvrage en sol renforcé qui ne présente pas les inconvénients des procédés selon l'art antérieur .

L'invention propose ainsi un procédé de modification d'un ouvrage en sol renforcé, ledit ouvrage comprenant:

- un remblai,

- un premier parement comprenant une face extérieure définissant la face frontale de l'ouvrage, et

- au moins un élément de stabilisation connecté au premier parement et s 'étendant dans une zone renforcée du remblai située à l'arrière de la face frontale de 1 ' ouvrage, le procédé de modification comprenant les étapes au cours desquelles :

- on dispose un deuxième parement le long de la face extérieure du premier parement,

- on déconnecte l'élément de stabilisation du premier parement ,

- on connecte l'élément de stabilisation au deuxième parement .

Avantageusement, le procédé selon l'invention ne nécessite pas d'opération de retrait des éléments de parement. Ainsi, la mise en œuvre du procédé selon l'invention ne présente pas de risques d'éboulement ou d'érosion de sorte que les opérations sont simplifiées et la sécurité nettement améliorée.

Un procédé selon l'invention peut en outre comporter l'une ou plusieurs des caractéristiques optionnelles suivantes considérées individuellement ou selon toutes les combinaisons possibles :

- la déconnexion de l'élément de stabilisation du premier parement est réalisée par ouverture à partir de la face extérieure dudit premier parement, par exemple par sciage, percussion ou carottage ;

- le procédé comprend en outre une étape où l'on dispose sur la face extérieure du premier parement un joint géotextile ;

- le procédé comprend en outre une étape où l'on dispose entre les premier et deuxième parements un matériau compressible ;

le procédé comprend en outre une étape de mise sous tension mécanique de l'élément de stabilisation après avoir déconnecté l'élément de stabilisation du premier parement ;

- le procédé comprend en outre une étape de mise en place d'un système de maintien de la tension mécanique de l'élément de stabilisation avant de déconnecter l'élément de stabilisation du premier parement ;

- le deuxième parement à sensiblement la même hauteur que le premier parement ;

- le deuxième parement est disposé contre le premier parement ;

le deuxième parement est disposé le long de la face extérieure du premier parement de sorte à définir un volume à remblayer, le procédé comprenant en outre une étape au cours de laquelle on apporte du matériau de remblai dans ledit volume ;

le deuxième parement est disposé le long de la face extérieure du premier parement de sorte à définir un volume à remblayer, le procédé comprenant en outre les étapes au cours desquelles:

o on apporte du matériau de remblai dans ledit volume, et

o on compacte le matériau de remblai placé dans ledit volume ;

- les premier et deuxième parements comprennent respectivement un premier et un deuxième ensemble d'éléments préfabriqués, les éléments préfabriqués des premier et deuxième ensembles ayant des formes et dimensions sensiblement identiques et les éléments préfabriqués du deuxième ensemble sont disposés selon un agencement sensiblement identique à celui des éléments préfabriqués du premier parement ; et/ou

le deuxième parement comprend un treillis auquel on connecte l'élément de stabilisation, le deuxième élément de parement étant ensuite obtenu par béton projeté.

L'invention se rapporte également à un ouvrage en sol renforcé modifié au moyen d'un procédé selon l'invention. L'invention sera mieux comprise à la lecture de la description qui va suivre, donnée uniquement à titre d'exemple et faite en se référant aux dessins annexés dans lesquels :

- la figure 1 est une vue schématique en coupe latérale d'un ouvrage en sol renforcé en cours de construction ;

- les figures 2a à 2d illustrent la mise en place d'un deuxième parement au moyen d'un procédé selon un premier mode de réalisation de l'invention,

- les figures 3a à 3b illustrent la mise en place d'un deuxième parement au moyen d'un procédé selon un deuxième mode de réalisation de l'invention,

la figure 4 est une vue schématique en coupe latérale d'un ouvrage en sol renforcé obtenue au moyen d'un procédé selon un troisième mode de réalisation de 1 ' invention .

Pour des raisons de clarté, les différents éléments représentés sur la figure ne sont pas nécessairement à l'échelle.

La figure 1 illustre un mur de soutènement en sol renforcé. Un remblai compacté 1 dans lequel sont distribués des éléments de stabilisation 2 et délimités sur la face frontale de l'ouvrage par un premier parement 3 constitué en juxtaposant des éléments préfabriqués 4 en forme de panneaux et sur le côté arrière par le terrain 5 contre lequel est dirigé le mur de soutènement.

Dans l'exemple représenté à la figure 1, les éléments de stabilisation 2 sont des éléments linéaires tels que des armatures en acier laminé ou des bandes géotextiles.

Les éléments de stabilisation 2 peuvent comprendre des armatures métalliques ou synthétiques par exemple en forme de bandes souples s 'étalant dans des plans horizontaux à l'arrière du premier parement 3. Il peut notamment s'agir de bandes de renforcement à base de fibres de polyester gainées de polyéthylène .

Les éléments de stabilisation 2 sont ancrés à la face arrière des éléments de parement 4 par exemple au moyen de chevilles à expansion, de pattes scellées, de clous ou d'anneaux métalliques ou encore de tout autre moyen d'ancrage connu de l'homme du métier.

Selon un premier mode de réalisation, le procédé selon l'invention permet de modifier un ouvrage en sol renforcé tel que représenté sur la figure 2a.

Le procédé selon l'invention peut permet par exemple d'agrandir l'ouvrage en sol renforcé. Ceci peut présenter un intérêt en particulier si l'ouvrage en sol renforcé supporte une route et qu'il est souhaitable d'élargir cette route .

Cet ouvrage en sol renforcé comprenant un remblai 1, un premier parement 3 comprenant une face extérieure 8 définissant la face frontale de l'ouvrage. Le premier parement étant composé d'un ensemble des premiers éléments de parement 4. L'ouvrage en sol renforcé comprend en outre des premiers éléments de stabilisation 2 connectés aux différents premiers éléments de parement 4 et s 'étendant dans une zone renforcée du remblai 1 située à l'arrière de la face frontale de l'ouvrage.

La figure 2a illustre une première étape du procédé selon l'invention. Au cours de cette première étape du procédé, on déconnecte au moins un des éléments de stabilisation 2 connectés de préférence au parement le plus bas. Pour réaliser cette déconnexion, on peut par exemple pratiquer un carottage de l'élément de parement 4 à partir de la face frontale de l'ouvrage à l'endroit où est connecté l'élément de stabilisation. Une fois ce carottage réalisé, il est possible de déconnecter l'élément de stabilisation de l'élément de parement 4.

Selon une variante de l'invention l'élément de stabilisation 4 peut être mis en tension au moyen d'éléments de rappel tels que décrits dans la demande FR0312083.

Le procédé selon ce premier mode de réalisation comprend ensuite une étape de mise en place d'un deuxième parement illustrée sur la figure 2b.

Au cours de cette étape de mise en place d'un deuxième parement, un élément 14 du deuxième parement est disposé le long de la face extérieure du premier parement 4 de sorte à définir un volume à remblayer 16.

Le procédé selon ce premier mode de réalisation comprend ensuite une étape de remblaiement illustrée sur la figure 2c.

Au cours de cette étape de remblaiement, du matériau de remblai est apporté et compacté progressivement dans le volume 16 défini entre le premier élément de parement 4 et le deuxième élément de parement 14, jusqu'à atteindre le niveau du carottage réalisé dans le premier élément de parement 4.

Parmi les matériaux pouvant être utilisés comme matériau de remblai on peut citer les sols naturels, les sols traités ou stabilisés à la chaux ou au liant hydraulique, les matériaux de recyclage comme par exemple les bétons recyclés, les fraisats routiers, certains résidus de combustion industrielle ou d'ordures ménagères, etc .

Le procédé comprend ensuite une étape de mise en place d'un deuxième élément de stabilisation illustrée sur la figure 2d. Au cours de cette étape de mise en place d'un deuxième élément de stabilisation, on dispose un élément de stabilisation 12 sur le remblai préalablement apporté et compacté. Ce deuxième élément de stabilisation 12 est connecté au premier élément de stabilisation 2, de sorte à former un nouvel élément de stabilisation comprenant le premier élément de stabilisation 2 et le deuxième élément de stabilisation 12 connectés entre eux.

Le deuxième élément de stabilisation 12 peut être connecté au premier élément de stabilisation 2 par tout moyen de connexion connu de l'homme du métier.

Du matériau de remblai est ensuite apporté par-dessus le deuxième élément de stabilisation 12 qui vient d'être installé. Ce matériau de remblai est compacté au fur et à mesure de son apport.

Les étapes peuvent être répétées autant que de besoin si plusieurs niveaux d'éléments de stabilisation sont disposés dans l'ouvrage en sol renforcé à modifier.

Selon une variante de l'invention, il est possible de mettre sous tension le nouvel élément de stabilisation comprenant les premier et deuxième éléments de stabilisation 2 et 12 après avoir connectés les premier et deuxième éléments de stabilisation entre eux. Cette mise sous tension peut se faire par exemple au moyen d'un dispositif de serrage mécanique tel un tendeur.

Selon une variante préférée de l'invention, le deuxième élément de parement 14 a sensiblement la même forme et dimension que les premiers éléments de parement 4.

Avantageusement, la mise en œuvre du procédé s'en trouve simplifiée et cela confère à l'ouvrage en sol renforcé des propriétés de flexibilité sensiblement identiques à celles de l'ouvrage initial. Selon un deuxième mode de réalisation, le procédé selon l'invention permet de réparer un ouvrage en sol renforcé sont les éléments de parement se seraient dégradés .

Selon ce deuxième mode de réalisation de l'invention, il est possible de réparer l'ensemble de l'ouvrage en sol renforcé tel qu'illustré sur la figure 3a.

Cet ouvrage en sol renforcé comprend un remblai 1, un premier parement 3 comportant une face extérieure 8 définissant la face frontale de l'ouvrage. Le premier parement étant composé d'un ensemble des premiers éléments de parement 4. L'ouvrage en sol renforcé comprend en outre des premiers éléments de stabilisation 2 connectés aux différents premiers éléments de parement 4 et s 'étendant dans une zone renforcée du remblai 1 située à l'arrière de la face frontale de l'ouvrage.

Le procédé selon l'invention permet de réparer l'ouvrage sans avoir besoin de remplacer les éléments de parement 4 un à un, évitant ainsi un processus long, minutieux et risqué.

Comme illustré sur la figure 3a, le procédé selon l'invention comprend une première étape au cours de laquelle on déconnecte un premier élément de stabilisation 2 connecté à un premier élément de parement 4, de préférence un des premier éléments de parement situé à la base de l'ouvrage en sol renforcé.

Cette déconnexion peut être réalisée par exemple par ouverture à partir de la face extérieure du premier élément de parement 4, par exemple par sillage, percussion ou carottage. Suite à cette déconnexion, on vient disposer un deuxième élément de parement 14 le long de la face extérieure du premier élément de parement, de préférence contre le premier élément de parement. Le premier élément de stabilisation 2 est ensuite connecté au deuxième élément de parement 14 comme illustré sur la figure 3b.

Selon une variante de l'invention, l'élément de stabilisation 2 peut être maintenu en tension après l'étape de carottage ou bien mis en tension une fois connecté au deuxième élément de parement 14.

Selon une variante de l'invention, le deuxième élément de parement 14 peut être muni de moyens d'ancrage permettant d'ancrer le premier élément de stabilisation 2 au deuxième élément de parement 14 et de moyen de mise sous tension, par exemple un tendeur.

Selon une variante de l'invention, il est possible afin d'éviter d'éventuelles fuites de débris entre les éléments de parement ou de remblai entre les joints, de mettre en place un joint géotextile complet sur la face frontale de l'ouvrage à réparer. Ce joint peut aussi être placé de façon à couvrir les joints entre les éléments du premier parement ; par exemple en collant des lés de joint géotextile sur le premier parement.

Selon une variante de l'invention, une feuille compressible par exemple en élastomère peut être disposée entre les premiers éléments de parement 4 et les deuxièmes éléments de parement 14. Dans ce cas, une mise en tension des éléments de stabilisation 2 avant leur connexion au deuxième élément de parement 14 est facilitée. Cette variante de l'invention est particulièrement avantageuse lorsque les premiers éléments de parement 4 risquent de continuer à se dégrader dans le temps, en particulier, en gonflant.

Selon une variante de l'invention, les nouveaux éléments de parement sont sensiblement identiques aux anciens éléments de parement et disposés de manière sensiblement identiques par rapport à ces derniers. Avantageusement, la mise en œuvre du procédé s'en trouve simplifiée et cela confère à l'ouvrage en sol renforcé des propriétés de flexibilité sensiblement identiques à celles de l'ouvrage initial.

Selon un troisième mode de réalisation illustré à la figure 4, il est envisageable de disposer contre la face frontale 8 de l'ouvrage en sol renforcé un deuxième parement comprenant un treillis 16, par exemple métallique, auquel seront connectés les éléments de stabilisation 2. Le deuxième élément de parement étant ensuite constitué au moyen de procédés de projection de béton sur le treillis auquel auront été préalablement connectés les éléments de stabilisation 2.

Des procédés de projection de béton sont bien connus de l'homme du métier.

L'invention ne se limite pas aux modes de réalisation décrits et qui doivent être interprétés de façon non limitatives et englobant tous modes équivalents.

En particulier, il est envisageable d'inverser l'ordre de certaines étapes des modes de réalisation particuliers décrits .