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Title:
PRODUCTION OF FRAMBINONE BY A RECOMBINANT FUNGAL MICROORGANISM
Document Type and Number:
WIPO Patent Application WO/2017/207950
Kind Code:
A1
Abstract:
The invention relates to a genetically modified fungal microorganism for the production of frambinone, said microorganism having the following characteristics: - the capacity to produce frambinone from tyrosine; and - a limited capacity or no capacity to break tyrosine down into tyrosol, p-hydroxyphenylacetaldehyde and/or p-hydroxyphenylacetate; and to the use of same for producing frambinone.

Inventors:
FARWICK ALEXANDER MATTHIAS (FR)
DESFOUGERES THOMAS (FR)
PIGNEDE GEORGES (FR)
ROUSSEL ANAÏS (FR)
MOULY ISABELLE (FR)
MORVAN BRIEUC (FR)
Application Number:
PCT/FR2017/051407
Publication Date:
December 07, 2017
Filing Date:
June 02, 2017
Export Citation:
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Assignee:
LESAFFRE & CIE (FR)
International Classes:
C12N1/15; C12N1/19; C12N15/52; C12P7/22
Foreign References:
GB2416769A2006-02-08
EP2957629A12015-12-23
GB2416769A2006-02-08
GB2416770A2006-02-08
Other References:
DANNA LEE ET AL: "Heterologous production of raspberry ketone in the wine yeast Saccharomyces cerevisiae via pathway engineering and synthetic enzyme fusion", MICROBIAL CELL FACTORIES, vol. 91, no. 1, 4 March 2016 (2016-03-04), pages 365, XP055338494, DOI: 10.1186/s12934-016-0446-2
ANGELICA RODRIGUEZ ET AL: "Establishment of a yeast platform strain for production of p-coumaric acid through metabolic engineering of aromatic amino acid biosynthesis", METABOLIC ENGINEERING, vol. 31, 1 September 2015 (2015-09-01), US, pages 181 - 188, XP055338973, ISSN: 1096-7176, DOI: 10.1016/j.ymben.2015.08.003
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VURALHAN ET AL., APPL. ENVIRON. MICROBIOL., vol. 69, 2003, pages 4534 - 41
STEENSMA; LINDE, YEAST, vol. 18, no. 5, 2001, pages 469 - 72
LEE ET AL., MICROB. CELL FACTORIES 15. DOI:10.1186/S12934-016-0446-2, 2016
Attorney, Agent or Firm:
BUCHET, Anne et al. (FR)
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Claims:
REVENDICATIONS

Microorganisme fongique modifié génétiquement pour la production de frambinone, ledit microorganisme présentant les caractéristiques suivantes :

la capacité à produire de la frambinone à partir de tyrosine ; et

une capacité faible ou une incapacité à dégrader la tyrosine en tyrosol, en p- hydroxyphényl acétaldéhyde et/ou en p-hydroxyphényl acétate.

Microorganisme selon la revendication 1 caractérisé en ce que le microorganisme est choisi parmi les ascomycètes ou les basidiomycètes, avantageusement du genre des Saccharomycetales, encore plus avantageusement de la famille des Debaryomycetaceae, des Dipodascaceae ou des Saccharomycetaceae, de manière préférée du genre Yarrowia, Debaryomyces, Arxula, Scheffersomyces, Geotrichum, Pichia ou Saccharomyces, préférentiellement de l'espèce Yarrowia lipolytica, Debaryomyces hansenii ou Saccharomyces cerevisiae.

Microorganisme selon l'une des revendications précédentes caractérisé en ce que le microorganisme comprend au moins une séquence hétérologue codant l'enzyme 4- coumarate:CoA ligase (4CL) ou benzalacétone synthase (BAS), avantageusement les enzymes 4CL et BAS.

Microorganisme selon la revendication 3 caractérisé en ce qu'il comprend en outre au moins une séquence hétérologue ou surnuméraire codant l'enzyme tyrosine ammonia lyase (TAL) ou benzalacétone réductase (BAR), avantageusement les enzymes TAL et BAR.

Microorganisme selon la revendication 3 ou 4 caractérisé en ce qu'il comprend en outre au moins une séquence hétérologue ou surnuméraire codant l'enzyme phénylalanine ammonia lyase (PAL) ou cinnamate 4-hydroxylase (C4H), avantageusement les enzymes PAL et C4H.

Microorganisme selon l'une des revendications précédentes caractérisé en ce qu'il présente une activité hydroxyphényl pyruvate décarboxylase (HPPDC) inférieure ou égale à 2 x 10~6 kat par g de protéine, avantageusement inférieure ou égale à 5 x 10~7 kat par g de protéine.

7. Microorganisme selon la revendication 6 caractérisé en ce qu'il comprend au moins une mutation ou une délétion dans au moins un des gènes codant les enzymes suivantes : désaminase Aro8, désaminase Aro9, décarboxylase ArolO, décarboxylase Pdc5, décarboxylase Pdc6, alcool déshydrogénase (ADH), avantageusement ArolO, Pdc5 et/ou Pdc6.

8. Microorganisme selon la revendication 7 caractérisé en ce qu'il s'agit de la souche Saccharomyces cerevisiae R 8 déposée auprès de la CNCM (Collection Nationale de Cultures et Microorganisme, Institut Pasteur, 25 rue du Docteur Roux, 75724 Paris Cedex 15) en date du 26 avril 2017, sous le numéro 1-5200.

9. Utilisation d'un microorganisme fongique selon l'un des revendications 1 à 8 pour la production de frambinone, avantageusement par fermentation aérobie.

10. Procédé de production de frambinone comprenant la culture d'un microorganisme fongique selon l'un des revendications 1 à 8 dans un milieu comprenant de la tyrosine.

11. Procédé de production de frambinone comprenant la culture d'un microorganisme fongique présentant une capacité à produire de la frambinone à partir de tyrosine dans un milieu comprenant de la tyrosine et un répresseur de la voie de dégradation de la tyrosine en tyrosol, en p-hydroxyphényl acétaldéhyde et/ou en p-hydroxyphényl acétate.

12. Procédé de production de frambinone selon la revendication 11 caractérisé en ce que le répresseur est le glutamate.

13. Procédé de production de frambinone selon la revendication 11 ou 12 caractérisé en ce que le microorganisme présente les caractéristiques déclinées aux revendications 2 à 5.

14. Procédé de production de frambinone selon l'une des revendications 11 à 13 caractérisé en ce que le microorganisme est la souche industrielle Saccharomyces cerevisiae R 4 déposée auprès de la CNCM en date du 1er Juin 2016, sous le numéro 1-5101.

15. Procédé de production de frambinone selon l'une des revendications 11 à 13 caractérisé en ce que le microorganisme est la souche industrielle Saccharomyces cerevisiae R 5 déposée auprès de la CNCM en date du 26 avril 2017, sous le numéro 1-5199.

Description:
PRODUCTION DE FRAMBINONE PAR UN MICROORGANISME

FONGIQUE RECOMBINANT

DOMAINE DE L'INVENTION

La présente invention vise des méthodes permettant de produire efficacement de la frambinone à partir de tyrosine en utilisant des microorganismes fongiques et des conditions de culture adaptés.

ETAT DE LA TECHNIQUE

La saveur de la framboise {Rubus idaeus) est liée à plus de 200 composés, mais la frambinone, un composé phénolique naturel, est le composé qui a le plus d'impact, définissant son goût caractéristique (Klesk et al., 2004, J. Agric. Food Chem. 52, 5155- 61; Larsen et al., 1991 , Acta Agric. Scand. 41, 447-54). Elle peut aussi être trouvée dans d'autres fruits et légumes, incluant la pêche, la pomme et la rhubarbe (Beekwilder et al., 2007, Biotechnol. J. 2, 1270-79). Dans la mesure où elle n'est présente qu'en petite quantité dans les framboises (1-4 mg par kg de fruits), la frambinone naturelle est d'une grande valeur (Larsen et al., 1991). Comme sa disponibilité naturelle est limitée, sa production biotechnologique est hautement désirable.

La frambinone (N° CAS: 5471-51-2), également appelée cétone framboise ou 4-(4- hydroxyphényl)butan-2-one, possède la structure suivante:

La frambinone peut être utilisée dans un grand nombre d'applications, notamment dans le domaine agro alimentaire et pour les cosmétiques (en tant qu'arôme), pour l'agriculture (en tant qu'appât/leurre pour insectes) et même dans le domaine de la santé (en tant que produit amincissant) ou en médecine (en tant qu'inhibiteur de la mélanogénèse). La frambinone peut être obtenue à partir de l'acide aminé aromatique L-tyrosine comme substrat initial via une voie de biosynthèse en 4 étapes (Figure 1 ; Beekwilder et al., 2007, Biotechnol. J. 2, 1270-79): La tyrosine est désaminée par une tyrosine ammonia lyase (TAL, EC 4.3.1.23) pour former de l'acide coumarique. Catalysée par une 4- coumarate:CoA ligase (4CL, EC 6.2.1.12), une molécule de Coenzyme A (CoA) est greffée sur l'acide coumarique. Le coumaroyl-CoA est alors converti par une benzalacétone synthase (BAS, EC 2.3.1.212) en 4-hydroxy benzalacétone. Cette réaction est une condensation décarboxylative et utilise une unité de malonyl-CoA en tant que co- substrat. L'étape finale est la réduction du 4-hydroxy benzalacétone en frambinone par une benzalacétone réductase (BAR, EC 1.3.1.x).

Un substrat alternatif pour la production de frambinone est l'acide coumarique, un intermédiaire de la voie décrite ci-dessus (notée (2) à la Figure 1). Toutefois, au vu du prix des substrats utilisés pour la bioconversion, les applications industrielles sont davantage profitables lorsque la tyrosine est mise en œuvre plutôt que l'acide coumarique.

La L-phénylalanine (notée (7) à la Figure 1) peut également être utilisée comme substrat puisqu'elle peut être convertie en acide coumarique via l'acide cinnamique (notée (8) à la Figure 1). En effet, la formation de frambinone dans les plantes utilise la voie générale des phénylpropanoides, qui débute avec la phénylalanine (Borejsza-Wysocki and Hrazdina, 1994, Phytochemistry 35, 623-28.). La première étape est une désamination catalysée par une phénylalanine ammonia lyase (PAL, EC 4.3.1.24). L'acide cinnamique produit est alors hydroxylé par une cinnamate 4-hydroxylase (C4H, EC 1.14.13.11) pour former de l'acide coumarique qui est converti comme décrit ci-dessus. C4H est un cytochrome P450 et est associée avec la membrane du réticulum endoplasmique. Son expression semble problématique et la pleine activité nécessite également une enzyme auxiliaire (cytochrome P450 réductase, CPR) (Bassard et al., 2012, Plant Cell 24, 4465- 82; Schuckel et al, 2012, ChemBioChem 13, 2758-63; Winkel, 2004, Rev. Plant Biol. 55, 85-107).

Les biosynthèses de deux autres composés d'intérêt biotechnologique, resvératrol et naringénine, montrent de nombreuses similarités avec la voie proposée de la frambinone (Jeandet et al., 2012, J. Biomed. Biotechnol. 2012, 1-14; Lussier et al., 2012, Comput. Struct. Biotechnol. J. 3, 1-11.). TAL et 4CL sont utilisées pour convertir la tyrosine et l'acide coumarique en coumaroyl-CoA. Une stilbène synthase (STS) ou chalcone synthase (CHS) catalyse alors la condensation consécutive avec trois unités malonyl- CoA pour former du resvératrol ou du naringénine chalcone, respectivement. Au vu de l'intérêt pour une production alternative à la synthèse chimique de la frambinone, il a été tenté de transposer ces voies de synthèse dans des microorganismes recombinants, en particulier chez Escherichia coli et Saccharomyces cerevisiae.

En particulier, GB 2 416 769 décrit la possibilité de produire de la frambinone à l'aide d'un microorganisme (en particulier bactéries et levures) contenant une séquence codant 4CL et BAS, au moins une étant de source hétérologue. Il peut en outre comprendre une séquence codant BAR, C4H, PAL et/ou CHS, la séquence codant BAR étant avantageusement endogène. Dans les exemples, ce document rapporte:

- le clonage du gène CHS du framboisier;

- le clonage du gène 4CL du tabac;

- le clonage du gène BAS de la rhubarbe;

- la transformation d'E. coli avec le gène BAR du framboisier;

- la production de benzalacétone et de frambinone (0.2 μg dans 50 ml) à partir d'acide coumarique chez E. coli transformé avec BAS et 4CL;

- la production de frambinone à partir de benzalacétone chez E. coli ayant une activité BAR endogène.

Sur la base de l'hypothèse que CHS possède une activité BAS, GB 2 416 770 décrit la possibilité de produire du benzalacétone et de la frambinone à l'aide d'un microorganisme comprenant une séquence codant 4CL (par exemple de tabac) et CHS (par exemple du framboisier ou de Pétunia), au moins une étant de source hétérologue. Il peut en outre comprendre une séquence codant BAR (par exemple du framboisier), C4H et PAL. Dans les exemples, ce document rapporte:

- la production de benzalacétone et de naringénine à partir d'acide coumarique chez E. coli transformé avec CHS et 4CL;

- la construction d'une protéine mutée CHS (CHS*) présumée avoir une activité BAS supérieure;

- la production de benzalacétone et de frambinone (14.2/0.3 μg dans 50 ml) à partir d'acide coumarique chez E. coli ayant une activité BAR endogène et transformée avec CHS/CHS* et 4CL;

- la production de benzalacétone à partir d'acide coumarique chez S. cerevisiae (ayant une activité BAR endogène) transformée avec CHS et 4CL. Aucune valeur n'est donnée en rapport avec la frambinone. De plus, la protéine mutante CHS* semble inefficace. De manière similaire, Beekwilder et al. (2007, Biotechnol. J. 2, 1270-79) rapporte uniquement la production avec succès de frambinone à partir d'acide coumarique chez E. coli transformée avec CHS et 4CL mais avec un rendement de 0.3 mg/L. Aucune donnée convaincante n'est rapportée pour la production chez la levure.

Récemment, Lee et al. (2016, Microb. Cell Factories 15. doi:10.1186/sl2934-016-0446- 2) ont démontré la synthèse de frambinone à partir d'acide coumarique en exprimant un gène 4CL et BAS chez S. cerevisiae (jusqu'à 8 mg/L). De plus, l'expression de PAL/TAL et de C4H a permis la production de novo de frambinone (jusqu'à 4 mg/L).

Par ailleurs, Rodriguez et al. (2015, Metabolic Engineering 31, 181-188) ont décrit une levure génétiquement modifiée pour la production d'acide coumarique, le précurseur de flavonoïdes comme le resvératrol et la naringénine. Ainsi, il est rapporté que l'inactivation des gènes PDC5 et ARO10 codant une pyruvate décarboxylase et une phénylpyruvate décarboxylase, respectivement, entraine une surproduction d'acide coumarique.

Il existe toutefois un besoin évident de développer de nouvelles solutions techniques permettant une production efficace de frambinone.

DESCRIPTION DE L'INVENTION

Définitions

Les définitions ci-dessous correspondent au sens généralement utilisé dans le contexte de l'invention et sont à prendre en compte, à moins qu'une autre définition ne soit explicitement indiquée. Au sens de l'invention, les articles « un » et « une » sont utilisés pour se référer à une ou à plusieurs (par exemple à au moins une) unités de l'objet grammatical de l'article. A titre d'exemple, « un élément » désigne au moins un élément, c'est-à-dire un élément ou plus.

Les termes « environ » ou « approximativement », utilisés en référence à une valeur mesurable telle qu'une quantité, une durée, et autres valeurs analogues, doivent être compris comme englobant des incertitudes de mesure de ± 20% ou de ± 10%, préférentiellement de ± 5%, encore plus préférablement de ± 1%, et de manière particulièrement préférée de ± 0,1 % de la valeur spécifiée. Intervalles: tout au long de la présente description, les différentes caractéristiques de l'invention peuvent être présentées sous forme d'intervalle de valeurs. Il doit être compris que la description de valeurs sous forme d'intervalle a uniquement pour finalité de rendre la lecture plus simple et ne doit pas être interprétée comme une limitation rigide de la portée de l'invention. En conséquence, la description d'un intervalle de valeurs devrait être considérée comme divulguant spécifiquement tous les intervalles intermédiaires possibles ainsi que chacune des valeurs au sein de cet intervalle. Par exemple, la description d'un intervalle allant de 1 à 6 devrait être considérée comme décrivant spécifiquement chacun des intervalles qu'il comprend, tels que les intervalles allant de 1 à 3, de 1 à 4, de 1 à 5, de 2 à 4, de 2 à 6, de 3 à 6, etc., ainsi que chacune des valeurs dans cet intervalle, par exemple, 1, 2, 2,7, 3, 4, 5, 5,3 et 6. Cette définition vaut indépendamment de la portée de l'intervalle. Le terme « isolé » doit être compris dans le contexte de l'invention comme synonyme de retiré ou extrait de son environnement ou état naturel. Par exemple, un acide nucléique ou un peptide isolé est un acide nucléique ou un peptide extrait de l'environnement naturel dans lequel on le trouve habituellement, qu'il s'agisse d'une plante ou d'un animal vivant par exemple. Ainsi, un acide nucléique ou un peptide naturellement présent dans un animal vivant n'est pas un acide nucléique ou un peptide isolé au sens de l'invention, tandis que le même acide nucléique ou peptide, partiellement ou complètement séparé des autres éléments présents dans son contexte naturel, est quant à lui « isolé » au sens de l'invention. Un acide nucléique ou un peptide isolé peut exister sous une forme substantiellement purifiée, ou peut exister dans un environnement non natif tel que, par exemple, une cellule hôte.

Dans le contexte de l'invention, les abréviations suivantes sont utilisées pour les bases d'acide nucléique les plus courantes. « A» » se réfère à l'adénosine, « C » se réfère à la cytosine, « G » désigne la guanosine, « T » désigne la thymidine, et « U » se réfère à l'uridine.

Sauf indication contraire, au sens de l'invention, une « séquence de nucléotides codant pour une séquence d'acides aminés » désigne toutes les séquences nucléotidiques qui codent pour la séquence d'acides aminés, y compris les séquences de nucléotides dégénérées permettant d'obtenir ladite séquence d'acide aminés. La séquence nucléotidique qui code pour une protéine ou un ARN ou un ADNc peut éventuellement comprendre des introns. Les termes « codant » ou « codant pour », « code » ou « code pour » se réfèrent à la propriété inhérente aux séquences spécifiques de nucléotides dans un polynucléotide, tel qu'un gène, un ADNc ou un AR m, à servir de matrice pour la synthèse d'autres polymères et macro molécules dans des processus biologiques, ayant soit une séquence définie de nucléotides (par exemple ARNr, ARNt et de l'ARNm), ou une séquence définie d'acides aminés, et les propriétés biologiques qui en découlent. Ainsi, un gène code pour une protéine si la transcription et la traduction de l'ARNm correspondant à ce gène produisent la protéine dans une cellule ou un autre système biologique. Tant le brin codant, dont la séquence nucléotidique est identique à la séquence d'ARNm et qui est généralement décrite dans les listages de séquences et bases de données, que le brin non codant, utilisé comme matrice pour la transcription d'un gène ou de l'ADNc, peuvent être désignés comme codant pour la protéine ou un autre produit de ce gène ou ADNc.

Le terme « polynucléotide » tel qu'utilisé dans le contexte de l'invention est défini comme une chaîne de nucléotides. En outre, les acides nucléiques sont des polymères de nucléotides. Ainsi, les termes acides nucléiques et polynucléotides tels qu'utilisés dans le cadre de l'invention sont interchangeables. Il est bien connu dans le domaine de la biologie moléculaire et du génie génétique que les acides nucléiques sont des polynucléotides, qui peuvent être hydrolysés en monomères. Les nucléotides sous forme monomère peuvent être hydrolysés en nucléosides. Tel qu'utilisé dans le contexte de l'invention, le terme polynucléotide désigne, à titre non limitatif, tout type de molécules d'acides nucléiques, c'est-à-dire les molécules d'acides nucléiques pouvant être obtenues par tout moyen disponible dans la technique, y compris par des moyens recombinants, à savoir le clonage de séquences d'acides nucléiques à partir d'une bibliothèque recombinante ou le génome d'une cellule, en utilisant des technologies de clonage ordinaire telle la PCR, ou par synthèse.

Au sens de l'invention, les termes « peptide », « polypeptide » et « protéine » sont utilisés de manière interchangeable et font référence à un composé constitué de résidus d'acides aminés liés de manière covalente par des liaisons peptidiques. Une protéine contient par définition au moins deux acides aminés, sans limitation quant au nombre maximum d'acides aminés. Les polypeptides comprennent indifféremment plusieurs peptides et/ou protéines, lesquels comprennent eux-mêmes deux acides aminés ou plus reliés les uns aux autres par des liaisons peptidiques. Tel qu'il est utilisé ici, le terme se réfère à la fois à des chaînes courtes, qui sont également couramment désignés dans la technique comme des peptides, des oligopeptides et oligomères par exemple, et à des chaînes plus longues, qui sont généralement désignés dans la technique comme des protéines, dont il existe de nombreux types. Les « polypeptides » comprennent, par exemple, des fragments bio logiquement actifs, des polypeptides substantiellement homologues, des oligopeptides, des homodimères, des hétérodimères, des variants de polypeptides, des polypeptides modifiés, des dérivés, des analogues, des protéines de fusion, entre autres. Les polypeptides comprennent des peptides naturels, des peptides recombinants, des peptides synthétiques, ou une combinaison de ceux-ci.

Les termes « homologue » et « identique » se réfèrent à la similarité de séquence ou l'identité de séquence entre deux polypeptides ou entre deux molécules d'acide nucléique. Quand une position dans chacune des deux séquences comparées est occupée par la même base ou sous-unité monomère d'acide aminé (par exemple, lorsqu'une position dans chacune des deux molécules d'ADN est occupée par une adénine), alors les molécules sont homologues ou identiques pour cette position. Le pourcentage d'identité entre deux séquences est fonction du nombre de positions correspondant partagées par les deux séquences, et correspond à ce nombre divisé par le nombre de positions comparées et multiplié par 100. Par exemple, si 6 sur 10 des positions dans deux séquences appariées sont identiques, alors les deux séquences sont identiques à 60%. En règle générale, la comparaison est effectuée en alignant les deux séquences de façon à donner une homologie/identité maximale. Un « vecteur » au sens de l'invention est une construction moléculaire qui comprend un acide nucléique isolé et qui peut être utilisée pour délivrer l'acide nucléique isolé à l'intérieur d'une cellule. De nombreux vecteurs sont connus dans l'art y compris, mais sans s'y limiter, les polynucléotides linéaires, des polynucléotides associés à des composés ioniques ou amphiphiles, des plasmides et des virus. Ainsi, le terme « vecteur » désigne par exemple un plasmide à réplication autonome ou un virus. Le terme doit également être interprété comme comprenant des composés non plasmidiques ou non viraux qui facilitent le transfert d'acides nucléiques dans des cellules, tels que, par exemple, les composés de polylysine, des liposomes, et analogues. Les termes « vecteur d'expression » désignent un vecteur comprenant un polynucléotide recombinant, lequel comprend des séquences de contrôle d'expression liées de manière opérationnelle à une séquence nucléotidique à exprimer. Un vecteur d'expression comprend notamment des éléments d'expression agissant en cis; d'autres éléments pour l'expression pouvant être fournis par la cellule hôte ou par un système d'expression in vitro. Les vecteurs d'expression au sens de l'invention incluent tous ceux connus dans l'art, tels que des cosmides, des plasmides (par exemple nus ou contenus dans des liposomes) et des virus (par exemple les lentivirus, les rétrovirus, les adénovirus et les virus adéno-associés) qui incorporent le polynucléotide recombinant. Le terme « promoteur » tel qu'utilisé ici est défini comme une séquence d'ADN reconnue par la machinerie de synthèse de la cellule, ou la machinerie de synthèse introduite, nécessaire pour initier la transcription spécifique d'une séquence de polynucléotides.

Au sens de l'invention, les termes « séquence promotrice/régulatrice » désignent une séquence d'acide nucléique, nécessaire pour l'expression du polynucléotide lié de manière opérationnelle à la séquence promotrice/régulatrice. Dans certains cas, cette séquence peut être la séquence de base du promoteur, tandis que dans d'autres cas cette séquence peut également comprendre une séquence activatrice et d'autres éléments régulateurs, utiles pour l'expression du polynucléotide. La séquence promotrice/régulatrice peut être, par exemple, une séquence permettant l'expression du polynucléotide qui soit spécifique d'un tissu, c'est-à-dire se produisant préférentiellement dans ce tissu.

Au sens de l'invention, un promoteur « constitutif » est une séquence nucléotidique qui, lorsqu'elle est liée de manière opérationnelle à un polynucléotide, conduit à une expression du polynucléotide dans la plupart ou toutes les conditions physiologiques de la cellule.

Au sens de l'invention, un promoteur « inductible » est une séquence de nucléotides qui, lorsqu'elle est liée de manière opérationnelle à un polynucléotide, conduit à une expression du polynucléotide uniquement quand un inducteur du promoteur est présent dans la cellule.

DESCRIPTION DETAILLEE DE L'INVENTION

La présente invention concerne un microorganisme fongique modifié génétiquement pour la production de frambinone, ledit microorganisme présentant les caractéristiques suivantes :

la capacité à produire de la frambinone à partir de tyrosine ; et

une capacité faible ou une incapacité à dégrader la tyrosine en tyrosol, en p- hydroxyphényl acétaldéhyde et/ou en p-hydroxyphényl acétate.

Dans le cadre de l'invention, l'expression « microorganisme modifié génétiquement » signifie que le microorganisme selon l'invention ne se trouve pas dans la nature et est modifié par introduction de nouveaux éléments génétiques et/ou par délétion ou modification des éléments génétiques endogènes du microorganisme. Un tel microorganisme peut être soumis à une pression de sélection, en combinant mutagénèse dirigée et mise en culture dans le milieu de sélection. Dans la suite de l'exposé et pour des raisons de simplification, le terme « élément génétique » est utilisé de manière équivalente à « gène » ou « séquence ». Il s'agit donc d'une séquence d'acide nucléique, qui peut avoir tout type de fonctionnalité. Elle peut par exemple correspondre à une séquence codante (codant notamment une enzyme de la voie de synthèse ou de dégradation d'intérêt), ou bien une séquence régulatrice, en particulier un promoteur ou un terminateur. Notamment lorsqu'il s'agit d'une séquence codante, celle-ci peut être optimisée, c'est-à-dire modifiée pour intégrer les codons préférentiels de l'hôte, en l'occurrence le microorganisme fongique, dans lequel cette séquence est à exprimer. Selon un autre mode de réalisation privilégié, seule la séquence codante du gène d'intérêt ou ORF (pour « Open Reading Frame ») est isolée et mise en œuvre.

Selon un premier aspect, les nouveaux éléments génétiques introduits dans le microorganisme visé par l'invention sont des éléments génétiques dits exogènes ou hétéro logues, qui peuvent aussi bien être de nature synthétique ou issus d'autres organismes (ou sources). En particulier, un microorganisme peut exprimer des gènes exogènes ou hétérologues si ceux-ci sont introduits dans ledit microorganisme avec tous les éléments permettant leur expression chez le microorganisme hôte.

Selon un autre mode de réalisation, les gènes endogènes peuvent être modifiés pour moduler leur expression et/ou leur activité, par exemple en introduisant des mutations dans les séquences codantes pour modifier le produit du gène ou en modifiant les séquences régulatrices, par exemple en introduisant des séquences hétérologues en plus ou en remplacement des séquences régulatrices endogènes. La modulation des gènes endogènes peut résulter en une surexpression ou une augmentation de l'activité du produit du gène endogène ou au contraire une diminution de l'expression ou de l'activité de celui-ci. De surcroît, des copies surnuméraires ou additionnelles d'un gène endogène peuvent également être introduites dans le microorganisme, permettant ainsi d'augmenter le niveau d'expression et donc l'activité du produit codé par le gène.

Les techniques permettant l'introduction d'ADN dans un hôte (ou transformation) sont bien connues de l'homme du métier et comprennent notamment la perméabilisation des membranes par application d'un champ électrique (électroporation), par voie thermique (application d'un choc thermique) ou par voie chimique, par exemple à l'aide d'acétate de Lithium. Les éléments génétiques introduits peuvent être intégrés dans le génome de l'hôte, notamment par recombinaison homologue ou intégration chromosomique, avantageusement à l'aide de cassettes intégratives, ou exprimés de manière extrachromosomique à l'aide de plasmides ou de vecteurs. Différents types de plasmides, avantageusement autoréplicatifs, sont bien connus de l'homme du métier, qui diffèrent notamment par leur origine de réplication, leur promoteur (inductible ou constitutif), leur marqueur (par exemple une résistance à un antibiotique ou la capacité à croître dans un milieu sélectif) et le nombre de copies par cellule.

De manière avantageuse chez un microorganisme fongique, l'intégration chromosomique de gènes, notamment de cassettes d'expression portant des gènes hétérologues ou des copies surnuméraires de gènes endogènes, se fait par la technique dite d'intégration modulaire de cassette (« modular cassette intégration technique »). Selon un mode de réalisation particulier, l'intégration du ou des gènes se fait au niveau du locus HO. Dans le cas d'intégration de plusieurs cassettes, celles-ci sont choisies pour avoir des extrémités présentant des séquences homologues, appelées régions de recombinaison (RR), permettant la recombinaison homologue et l'intégration dans l'ordre souhaité et à la position souhaitée des différentes cassettes. De manière avantageuse, l'une des cassettes appelée « cassette marqueur » code un marqueur, par exemple une résistance à un antibiotique ou la capacité à croître dans un milieu sélectif, permettant de sélectionner ou d'identifier les microorganismes dans lesquels l'intégration chromosomique a effectivement eu lieu. De manière avantageuse, une cassette d'expression comprend la partie codante ou ORF d'un gène d'intérêt, notamment des enzymes impliquées dans la voie de biosynthèse de la frambinone à partir de tyrosine, placée sous le contrôle de séquences régulatrices, avantageusement au moins un promoteur et un terminateur, qui peuvent être les séquences régulatrices natives de ce gène ou des séquences hétérologues choisies pour leur fonctionnalité et/ou efficacité chez le microorganisme hôte. Concernant l'inactivation de gènes endogènes, celle-ci peut être réalisée en introduisant, par exemple par recombinaison homologue au niveau du gène cible, une cassette, soit au niveau des régions régulatrices inhibant ainsi l'expression du gène, soit au niveau de la séquence codante entraînant une inactivation du produit du gène. Selon un mode de réalisation particulier, la cassette est une cassette marqueur, comprenant avantageusement un gène marqueur dominant sous le contrôle d'un promoteur et d'un terminateur. De manière encore plus avantageuse, ladite cassette comprend à ses extrémités 5' et 3' des régions homologues aux régions 5' et 3' du gène visé, par exemple correspondant en 5 ' au promoteur du gène visé et correspondant en 3 ' au terminateur du gène visé. En outre, la cassette peut contenir des sites loxP permettant l'excision de cette cassette du génome grâce à l'action de la recombinase cre.

Dans le cadre de l'invention, des marqueurs adaptés sont des gènes conférant des résistances à des antibiotiques, qui sont alors introduits dans le milieu de culture du microorganisme modifié génétiquement pour assurer la sélection et le maintien de la modification génétique. De nombreux marqueurs sont à la disposition de l'homme du métier, comme par exemple :

le gène kanMX4 conférant une résistance à la généticine (ou G418) ;

le gène hphNTl conférant une résistance à l'hygromycine B ;

le gène bsd conférant une résistance à la blasticidine ;

le gène ble conférant une résistance à la phléomycine.

La bonne introduction et la fonctionnalité des modifications génétiques souhaitées peuvent être vérifiées par toute technique connue de l'homme du métier, notamment : sélection grâce au(x) marqueur(s) présent(s) dans la cassette d'expression ou dans le vecteur ;

ciblage de l'élément génétique introduit, par exemple par séquençage, par PCR (« Polymerase Chain Reaction ») ou par hybridation (« Southern blot » ou « Northern blot ») ;

ciblage du produit du gène visé, par exemple par détection immunologique (« Western blot ») ou par mesure de l'activité, par exemple enzymatique, associée.

Comme déjà dit, des éléments importants pour contrôler l'expression des gènes sont les promoteurs, placés en amont de la séquence codante dont l'expression est gouvernée par le promoteur. Ainsi, les gènes peuvent être exprimés à l'aide de promoteurs de force variable, inductibles ou constitutifs. Selon un mode de réalisation particulier, les promoteurs utilisés dans le cadre de l'invention sont des promoteurs constitutifs. Ces promoteurs peuvent être homologues ou hétérologues. Dans le contexte de l'invention, des promoteurs couramment utilisés par l'homme du métier sont par exemple :

le promoteur du gène TDH3 de S. cerevisiae, par exemple celui de séquence SEQ

ID NO : 1 ;

le promoteur du gène PFK2 de S. cerevisiae, par exemple celui de séquence SEQ ID NO : 4 ;

le promoteur du gène PGI1 de S. cerevisiae, par exemple celui de séquence SEQ ID NO : 7 ; le promoteur du gène PMA1 de S. cerevisiae, par exemple celui de séquence SEQ ID NO : 10 ;

le promoteur du gène PYK1 de S. cerevisiae, par exemple celui de séquence SEQ ID NO : 13 ;

- le promoteur du gène TEF1 de Ashbya gossypii, par exemple celui de séquence

SEQ ID NO : 15 ou de S. cerevisiae.

D'autres éléments importants pour contrôler l'expression des gènes sont les séquences terminatrices, également appelés terminateurs, placés en aval de la séquence codante à exprimer. Là encore, il peut s'agir de terminateurs homologues, issus du microorganisme en question, ou hétérologues, à savoir des séquences artificielles ou des terminateurs issus d'une autre source que le microorganisme hôte. De nombreuses séquences terminatrices sont à la disposition et connues de l'homme du métier, comme par exemple :

- le terminateur du gène CYC1 de Saccharomyces cerevisiae, par exemple celui de séquence SEQ ID NO : 3 ;

le terminateur du gène PFK2 de S. cerevisiae, par exemple celui de séquence SEQ ID NO : 6 ;

le terminateur du gène PGll de S. cerevisiae, par exemple celui de séquence SEQ ID NO : 9 ;

le terminateur du gène ZWF1 de S. cerevisiae, par exemple celui de séquence SEQ ID NO : 12 ;

le terminateur du gène PYK1 de S. cerevisiae, par exemple celui de séquence SEQ ID NO : 14 ;

- le terminateur du gène TEF1 de Ashbya gossypii, par exemple celui de séquence

SEQ ID NO : 17.

Dans le cadre de l'invention, le terme « microorganisme fongique » désigne avantageusement une levure ou un champignon.

Dans le cadre de l'invention, le terme « microorganisme fongique » s'entend comme une « souche de microorganisme fongique ». En effet et de manière avantageuse, le microorganisme fongique modifié génétiquement, objet de la présente invention, est obtenu à partir d'une souche isolée et au moins partiellement caractérisée. A titre d'illustration et en rapport avec les levures, on entend par « levure » un produit commercial obtenu grâce à la mise en œuvre d'un procédé de production d'une souche de levure. Ainsi, des levures présentant des caractéristiques différentes peuvent être obtenues à partir d'une même souche, ces différences étant liées au procédé de production mis en œuvre.

Plus précisément, l'invention vise une souche de levure, en d'autres termes une souche appartenant aux phylums des ascomycètes ou des basidiomycètes . Avantageusement, la souche appartient au genre des Saccharomycetales, encore plus avantageusement aux familles des Debaryomycetaceae, des Dipodascaceae ou des Saccharomycetaceae. Selon un mode de réalisation privilégié, la souche appartient aux genres Yarrowia, Debaryomyces, Arxula, Scheffersomyces, Geotrichum, Pichia ou Saccharomyces. Il peut par exemple s'agir des espèces Yarrowia lipolytica, Debaryomyces hansenii ou Saccharomyces cerevisiae.

Selon un mode de réalisation particulier, la souche mise en œuvre pour la construction d'une souche selon l'invention ou pour la mise en œuvre d'un procédé selon l'invention est une souche dite industrielle, par opposition à une souche dite de laboratoire. Les souches de levure dites industrielles sont celles aptes à être produites en utilisant des substrats industriels comme source de carbone. A titre d'exemple, ladite source de carbone peut être de la mélasse de canne à sucre ou de betterave.

Selon un mode de réalisation avantageux, le microorganisme est choisi en rapport avec au moins l'une des caractéristiques suivantes :

une capacité au moins partielle à produire de la frambinone à partir de tyrosine ; et/ou

une faible capacité ou une incapacité à dégrader la tyrosine en tyrosol, en p- hydroxyphényl acétaldéhyde et/ou en p-hydroxyphényl acétate.

Concernant la première caractéristique, le microorganisme qui va être modifié génétiquement peut présenter au moins une activité enzymatique endogène impliquée dans la conversion de la tyrosine en frambinone. Selon un mode de réalisation particulier, il est capable de convertir le 4-hydroxy benzalacétone en frambinone et présente donc naturellement une activité BAR, comme détaillée ci-dessous. Le microorganisme peut être choisi pour d'autres caractéristiques d'intérêt, notamment au vu de son application en biotechnologie (connaissance du génome, outils disponibles pour la manipulation génétique, ...), de son métabolisme (notamment respiratoire et lipidique favorisant la production du malonyl-CoA ou de l'acétyl-CoA, des co-substrats de la voie de synthèse de la frambinone), ou des conditions de son exploitation industrielle (croissance aérobie, tolérance au stress et aux composés toxiques, ...).

Selon un mode de réalisation particulier, un microorganisme d'intérêt est choisi dans la liste suivante : Beauveria bassiana, Candida boidinii, Galactomyces candidum (Geotrichum candidum), Kloeckera saturnus, Kodamaea ohmeri (Pichia ohmeri), Komagataella pastoris (Pichia pastoris), Mucor nederlandicus (Mucor subtilissimus), Pichia membranifaciens, Schwanniomyces etchellsii (Pichia etchellsii), Torulaspora delbrueckii (Saccharomyces fermentati), Wickerhamomyces anomalus (Hansenula anomala), Yarrowia lipolytica (Candida lipolytica), Saccharomyces cerevisiae, Debaryomyces hansenii. Avantageusement, il s'agit de Saccharomyces cerevisiae, Yarrowia lipolytica ou Debaryomyces hansenii.

Des microorganismes fongiques d'intérêt particulier sont par exemple Yarrowia lipolytica ou Debaryomyces hansenii.

Un microorganisme selon l'invention est destiné à produire de la frambinone à partir de tyrosine. De manière avantageuse, un tel microorganisme présente une capacité améliorée à produire de la frambinone à partir de tyrosine, notamment par rapport aux souches déjà décrites ou par rapport à ce même microorganisme n'ayant pas été modifié génétiquement.

Il est connu de produire de la frambinone à partir d'autres substrats mais d'un point de vue économique notamment, la tyrosine présente un intérêt évident. De surcroît, il a été montré que l'ajout de tyrosine dans le milieu de culture, avantageusement un milieu de fermentation, était possible en termes de solubilité et ne présentait pas de toxicité notoire. De manière adaptée et comme il sera vu plus en détail en rapport avec le procédé selon l'invention, la production de frambinone se fait à partir de tyrosine exogène au microorganisme selon l'invention, avantageusement par ajout dans son milieu de culture. Typiquement, la concentration en tyrosine dans le milieu de culture est supérieure ou égale à 50 mg/L, voire supérieure ou égale à 100, 150, 200, 250, 300, 350, 400 voire même 450 mg/L. En outre, elle est avantageusement inférieure ou égale à 1 g/L, voire inférieure ou égale à 950, 900, 850, 800, 750, 700, 650, 600, 550, 500 voire même 450 mg/L. Selon un autre aspect, l'invention concerne également l'utilisation d'un microorganisme tel que défini dans le cadre de la présente demande pour la production de frambinone à partir de tyrosine. Dans le cadre de l'invention, il est attendu des niveaux de production de la frambinone par un microorganisme encore jamais atteints, avantageusement une concentration dans le milieu de culture du microorganisme supérieure à 4 mg/L, encore plus avantageusement supérieure ou égale à 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19 voire même 20, 25 ou 30 mg/L. A ces concentrations et dans les conditions du procédé selon l'invention, la frambinone reste soluble et ne présente pas de toxicité vis-à- vis des microorganismes selon l'invention.

Selon une première caractéristique, un microorganisme selon l'invention ou mis en œuvre dans un procédé selon l'invention est modifié génétiquement pour présenter une capacité à produire ou synthétiser de la frambinone à partir de tyrosine, voire pour présenter une capacité améliorée à produire ou synthétiser de la frambinone à partir de tyrosine.

Selon l'invention, le microorganisme peut présenter naturellement une capacité à synthétiser de la frambinone à partir de tyrosine et les modifications génétiques apportées ont pour but d'améliorer cette capacité. Alternativement, le microorganisme ne présente pas naturellement de capacité à synthétiser de la frambinone à partir de tyrosine et les modifications génétiques apportées ont pour but de lui conférer cette capacité.

Pour rappel et comme illustré à la Figure 1, une voie de synthèse de la frambinone à partir de tyrosine implique 4 activités enzymatiques, à savoir :

une activité tyrosine ammonia lyase (EC 4.3.1.23), notée TAL, capable de désaminer la tyrosine pour former de l'acide coumarique ;

une activité 4-coumarate:CoA ligase (EC 6.2.1.12), notée 4CL, capable de catalyser le greffage d'une molécule de Coenzyme A (CoA) sur l'acide coumarique pour former le coumaroyl-CoA ;

une activité benzalacétone synthase (EC 2.3.1.212), notée BAS, capable de convertir le coumaroyl-CoA en 4-hydroxy benzalacétone en présence de malonyl- CoA en tant que co-substrat ;

- une activité benzalacétone réductase (EC 1.3.1.x), notée BAR, pour réduire le 4- hydroxy benzalacétone en frambinone. Selon un mode de réalisation avantageux, le microorganisme selon l'invention est modifié génétiquement pour assurer ou améliorer la production de frambinone à partir de tyrosol. Avantageusement, les modifications génétiques apportées permettent d'augmenter au moins l'une des quatre activités enzymatiques susmentionnées. Il peut par exemple s'agir :

de mutations dans la partie codante du gène permettant d'obtenir une enzyme présentant l'activité recherchée ou ayant une activité améliorée, notamment en termes de spécificité et d'affinité du substrat ;

de la modification des séquences régulatrices permettant d'augmenter le niveau d'expression d'un gène endogène codant une enzyme présentant l'activité recherchée ;

de l'apport de copie(s) surnuméraire(s) d'un gène endogène codant une enzyme présentant l'activité recherchée, ayant éventuellement été muté pour améliorer l'activité ;

de l'apport d'une ou plusieurs copies d'au moins un gène hétérologue (artificiel ou issu d'un autre organisme source) codant une enzyme présentant l'activité recherchée, placé sous le contrôle de séquences régulatrices adaptées pour produire ladite enzyme.

Concernant TAL, les enzymes de la famille des lyases ayant une activité prédominante pour la tyrosine (tyrosine ammonia lyase, EC 4.3.1.23) sont rares. Souvent, elle présente une affinité pour le substrat phénylalanine au moins égale voire supérieure (phénylalanine/tyrosine ammonia lyase, PAL/TAL, EC 4.3.1.25).

Dans certains cas de figure, il peut être souhaitable de choisir une enzyme TAL n'ayant pas ou présentant très peu d'activité PAL de manière à éviter l'accumulation de l'intermédiaire acide cinnamique qui peut présenter une certaine toxicité. Dans le cas où l'enzyme TAL choisi présente une activité PAL notoire, il peut être avantageux de s'assurer que le microorganisme possède en outre une activité C4H et/ou CPR, et éventuellement de le modifier pour introduire des séquences codant ces activités enzymatiques utiles à la conversion de l'acide cinnamique en acide coumarique. Alternativement, il peut être envisagé de muter la séquence codant TAL pour diminuer l'activité PAL éventuellement associée. En outre, une accumulation d'acide cinnamique peut exercer un rétrocontrôle négatif sur TAL de sorte qu'une expression balancée de 4CL peut être nécessaire. A noter que des tests enzymatiques pour évaluer les activités TAL et PAL sont bien connus de l'homme du métier et sont par exemple décrits dans les documents Berner et al. (J. Bacteriol, 2006, 188, 2666-73), Kyndt et al. (FEBS Lett., 2002 512, 240-44) et Rosier et al. (Plant Physiol., 1997, 113, 175-79).

Des gènes d'intérêt pouvant être mis en œuvre dans le cadre de l'invention sont listés dans le tableau 1 ci-dessous :

Nom Organisme Nom du gène / Références

Uniprot

RgTAL Rhodotorula glutinis 1 PAL Vannelli et al., 2007, Metab.

Eng. 9, 142-51.

Rhodosporidium PI 1544 US 6,521,748

toruloides SEQ ID NO: 18 Santos et al., 2011 , Metab. Eng.

13, 392-400

Wu et al., 2013, J. Biotechnol. 167, 404-11

Wu et al., 2014, PLoS ONE 9, el01492

Jiang et al., 2005, Appl. Environ. Microbiol. 71, 2962- 69

RsTAL Rhodobacter sphaeroides hutH Watts et al, 2004,

Chembiochem Eur. J. Chem. Q3IWB0 Biol. 5, 500-507

Watts et al, 2006, Chem. Biol. 13, 1317-26

Louie et al, 2006, Chem. Biol. 13, 1327-1338

Schroeder et al, 2008,

Phytochem. 69, 1496-1506 Xue et al, 2007, J. Ind.

Microbiol. Biotechnol. 34, 599- 604

Wang and Yu, 2012, J.

Biotechnol. 157, 258-260 Wang et al, 2011, Metab. Eng. 13, 455-463

Zhang et al, 2006, J. Am.

Chem. Soc. 128, 13030-31

RcTAL Rhodobacter capsulatus Xue et al, 2007, J. Ind.

Microbiol. Biotechnol. 34, 599- 604

Kyndt et al, 2002, FEBS Lett. 512, 240-44

SeTAL Saccharothrix sam8 Berner et al, 2006, J. Bacteriol.

188, 2666-73. espanaensis Q2EYY5 Choi et al, 2011, J. Ind.

Microbiol. Biotechnol. 38, 1657-65

Kang et al., 2012, Microb Cell Fact 11, 153

CpTAL Chitinophaga pinensis Cpin_1853/FlxA Schôner et al., 2014, Microb.

C7PAX7 Biotechnol. 7, 232-41

TcTAL Trichosporon cutaneum Vannelli et al., 2007, Enzyme

Microb. Technol. 41, 413-22

Selon un mode de réalisation particulier, la protéine TAL codée par le gène introduit dans le microorganisme selon l'invention présente la séquence SEQ ID NO : 18, ou une séquence protéique présentant au moins 70%, voire 80, 85, 90, 95 ou même 99%> d'homologie ou d'identité avec la séquence SEQ ID NO : 18 et possédant une activité TAL.

Selon un autre mode de réalisation particulier, la séquence codant la protéine TAL, introduite dans le microorganisme selon l'invention, présente la séquence SEQ ID NO : 5, ou une séquence présentant au moins 60%>, voire 70, 80, 85, 90, 95 ou même 99%> d'identité avec la séquence SEQ ID NO : 5. Son expression peut être placée sous le contrôle des séquences régulatrices SEQ ID NO : 4 et/ou SEQ ID NO : 6.

Concernant 4CL, il s'agit a priori d'une enzyme non présente dans les microorganismes fongiques visés par la présente invention. Ainsi et de manière avantageuse, au moins une copie d'au moins un gène hétérologue est introduit.

A noter que des tests enzymatiques pour évaluer l'activité 4CL sont bien connus de l'homme du métier et sont par exemple décrits dans les documents Ehlting et al. (Plant J., 1999, 19, 9-20), Knobloch and Hahlbrock (Arch. Biochem. Biophys., 1977, 184, 237- 48) et Lee and Douglas (Plant Physiol, 1996, 112, 193-205).

La majorité des 4-coumarate:CoA ligases (4CL ; EC6.2.1.12) sont trouvées dans les plantes. Des gènes d'intérêt pouvant être mis en œuvre dans le cadre de l'invention sont listés dans le tableau 2 ci-dessous :

Nom Organisme Nom du gène / Références

Uniprot

At4CL- Arabidopsis thaliana 4CL1 Ehlting et al., 1999, Plant J. 19, 1 9-20

Q42524 (NCBI: Hamberger and Hahlbrock, AAA82888.1) 2004, Proc. Natl. Acad. Sci. U. SEQ ID NO: 19 S. A. 101, 2209-14 Watts et al, 2004,

Chembiochem Eur. J. Chem.

Biol. 5, 500-507

Watts et al, 2006, BMC

Biotechnol. 6, 22

Koopman et al, 2012, Microb

Cell Fact ii, 155

Sydor et al, 2010, Appl.

Environ. Microbiol. 76, 3361-

63

Nt4CL- Nicotiana tabacum 4CL2 Beekwilder et al, 2007, 2 Biotechnol. J. 2, 1270-79

024146 (NCBI: Beekwilder et al, 2006, Appl. U50846) Environ. Microbiol. 72, 5670- 72

Pc4CL- Petroselinum crispum 4CL2 Léonard et al, 2008, Mol. 2 P14913 Pharm. 5, 257-65

(GenBank: Lim et al, 2011, Appl. Environ. CAA31697.1) Microbiol. 77, 3451-60

Wu et al, 2014, PLoS ONE 9, el01492

Xu et al, 2011, Metab. Eng. 13, 578-87.

Léonard et al, 2005, Appl. Environ. Microbiol. 71, 8241— 48.

Yan et al, 2005, Appl. Environ. Microbiol. 71, 5610-13

Lithospermum Q42880 Yazaki et al, 1997, Biosci. erythrorhizon Biotechnol. Biochem. 61, 1995- 2003

Populus trichocarpa x P.

deltoïdes

Glycine max

ScCCL Streptomyces coelicolor SC04383 Kaneko et al, 2003, J.

Q9K3W1 Bacteriol. 185, 20-27

Miyahisa et al, 2005, Appl. Microbiol. Biotechnol. 68, 498- 504

Cp4CL Chitinophaga pinensis Cpin 1877/FlxY Schôner et al, 2014, Microb.

C7PB01 Biotechnol. 7, 232-41

Selon un mode de réalisation particulier, la protéine 4CL codée par le gène introduit dans le microorganisme selon l'invention présente la séquence SEQ ID NO : 19, ou une séquence protéique présentant au moins 70%, voire 80, 85, 90, 95 ou même 99% d'homologie ou d'identité avec la séquence SEQ ID NO : 19 et possédant une activité 4CL. Selon un autre mode de réalisation particulier, la séquence codant la protéine 4CL, introduite dans le microorganisme selon l'invention, présente la séquence SEQ ID NO : 8, ou une séquence présentant au moins 60%, voire 70, 80, 85, 90, 95 ou même 99% d'identité avec la séquence SEQ ID NO : 8. Son expression peut être placée sous le contrôle des séquences régulatrices SEQ ID NO : 7 et/ou SEQ ID NO : 9.

A noter que l'accumulation de coumaryl-CoA générée sous l'action de 4CL peut engendrer la formation indésirable d'acide phlorétique et inhiber l'activité TAL. Il est donc important que le microorganisme selon l'invention présente une activité BAS (catalysant l'étape suivante dans la voie de synthèse de la frambinone) adaptée.

Concernant BAS, il s'agit a priori d'une enzyme non présente dans les microorganismes fongiques visés par la présente invention. Ainsi et de manière avantageuse, au moins une copie d'au moins un gène hétérologue est introduite.

A noter que des tests enzymatiques pour évaluer l'activité BAS sont bien connus de l'homme du métier et sont par exemple décrits dans les documents Abe et al. (Eur. J. Biochem., 2001, 268, 3354-59 et Morita et al, 2010). Morita et al. Acad. Sci., 2010, 107, 669-673).

Les benzalacetone synthases (BAS; EC2.3.1.212) font partie de la famille des PKS (PolyKetone Synthase), qui inclut également les chalcone synthases (CHS; impliquées par exemple dans la synthèse de la naringénine) et des stilbène synthases (STS; impliquées par exemple dans la synthèse du resvératrol). Ces enzymes acceptent le coumaroyl-CoA et d'autres substrats, et catalysent une condensation avec le malonyl- CoA. Le malonyl-CoA est un intermédiaire dans la synthèse des acides gras et sa formation nécessite de ΑΤΡ. Alors que les CHS et STS ajoutent trois unités malonyl- CoA, BAS en ajoute seulement une. Cependant, les enzymes BAS décrites ont aussi une activité CHS. Des gènes d'intérêt pouvant être mis en œuvre dans le cadre de l'invention sont listés dans le tableau 3 ci-dessous :

Nom Organisme Nom du gène / Références

Uniprot

RpBAS Rheum palmatum BAS Abe et al., 2001, Eur. J.

Q94FV7 Biochem. 268, 3354-59.

SEQ ID NO: 20 Shimokawa et al., 2012, Front.

Pla nt Sci. 3.

Abe et al., 2003, J. Biol. Chem. 278, 25218-26. Abe et al., 2007, Bioorg. Med.

Chem. Lett. 17, 3161-66.

Jez et al., 2001, J. Ind.

Microbiol. Biotechnol. 27, 393- 398.

Morita et al., 2010, Proc. Natl. Acad. Sci. 107, 669-673.

RiPKS Rubus idaeus PKS4 Kumar and Ellis, 2003, 4 B0LDU5 Phytochemistry 62, 513-26.

Zheng and Hrazdina, 2008, Arch. Biochem. Biophys. 470, 139-145.

Zheng et al., 2001, Plant Mol. Biol. 46, 1-15

Beekwilder et al., 2007, Biotechnol. J. 2, 1270-79.

PKS1 Wachendorfia thyrsiflora

Brand et al., 2006, Planta 224, 413-28.

PKS1 Polygonum cuspidatum

Ma et al., 2009, Planta 229, 1077-86

PKS2 Polygonum cuspidatum Ma et al, 2009, Planta 229,

457-69.

Selon un mode de réalisation particulier, la protéine BAS codée par le gène introduit dans le microorganisme selon l'invention présente la séquence SEQ ID NO : 20, ou une séquence protéique présentant au moins 70%, voire 80, 85, 90, 95 ou même 99% d'homologie ou d'identité avec la séquence SEQ ID NO : 20 et possédant une activité BAS.

Selon un autre mode de réalisation particulier, la séquence codant la protéine BAS, introduite dans le microorganisme selon l'invention, présente la séquence SEQ ID NO : 11, ou une séquence présentant au moins 60%>, voire 70, 80, 85, 90, 95 ou même 99%> d'identité avec la séquence SEQ ID NO : 11. Son expression peut être placée sous le contrôle des séquences régulatrices, en particulier un promoteur de séquence SEQ ID NO : 10 ou SEQ ID NO : 13 et/ou un terminateur de séquence SEQ ID NO : 12 ou SEQ ID NO : 14.

Selon un autre mode de réalisation particulier, au moins deux séquences codant BAS, par exemple deux copies d'une même séquence, sont introduites dans le microorganisme selon l'invention. A noter qu'elles peuvent être placées sous le contrôle de séquences régulatrices différentes. La dernière étape de la voie de synthèse de la frambinone est la réduction de la double liaison α,β en p-hydroxy benzalacétone, qui nécessite du NADPH, catalysée par une benzalacétone réductase (BAR ; EC 1.3.1.x). Seulement deux enzymes possédant cette activité ont été identifiées à ce jour. Toutefois, certains microorganismes ont été rapportés comme possédant une activité BAR endogène comme par exemple E. coli et S. cerevisiae (Beekwilder et al., 2007, Biotechnol. J. 2, 1270-79). La première enzyme est décrite dans le document GB 2 416 769 : une protéine de 309 acides aminés a été isolée à partir de fractions protéiques de framboisier présentant une activité BAR. Elle présente de l'homologie avec les isoflavone réductases (EC 1.3.1.45) et est capable de convertir le p- hydroxy benzalacétone en frambinone dans des essais in vitro réalisés avec de l'enzyme purifiée. En 2011, Koeduka et al. (Biochem. Biophys. Res. Commun. 412, 104-108) ont identifié une cétone/zingérone synthase de R. idaeus qui possède une activité BAR (RiRZSl, Uniprot G1FCG0). La protéine purifiée convertit effectivement le p-hydroxy benzalacétone en frambinone dans un test enzymatique.

A noter que des tests enzymatiques pour évaluer l'activité BAR sont bien connus de l'homme du métier et sont par exemple décrits dans le document Koeduka et al. (Biochem. Biophys. Res. Commun., 2011, 412, 104-108).

Selon un mode de réalisation particulier, la protéine BAR est codée par un gène introduit dans le microorganisme selon l'invention et elle présente la séquence SEQ ID NO : 21, ou une séquence protéique présentant au moins 70%, voire 80, 85, 90, 95 ou même 99% d'homologie ou d'identité avec la séquence SEQ ID NO : 21 et possédant une activité BAR.

Selon un autre mode de réalisation particulier, la séquence codant la protéine BAR, introduite dans le microorganisme selon l'invention, présente la séquence SEQ ID NO : 2, ou une séquence présentant au moins 60%>, voire 70, 80, 85, 90, 95 ou même 99% d'identité avec la séquence SEQ ID NO : 2. Son expression peut être placée sous le contrôle des séquences régulatrices, en particulier de séquences SEQ ID NO : 1 et/ou SEQ ID NO : 3.

Selon un mode de réalisation particulier, le microorganisme fongique selon l'invention est dépourvu naturellement d'au moins une activité enzymatique parmi 4CL et BAS, voire des 2. Avantageusement, le microorganisme fongique selon l'invention comprend au moins une séquence hétérologue codant l'enzyme 4-coumarate:CoA ligase (4CL) ou benzalacétone synthase (BAS), avantageusement les enzymes 4CL et BAS. Selon un mode de réalisation privilégié, ladite séquence code une enzyme 4CL présentant la séquence SEQ ID NO : 19, ou une séquence protéique présentant au moins 70%, voire 80, 85, 90, 95 ou même 99% d'homologie ou d'identité avec la séquence SEQ ID NO : 19 et possédant une activité 4CL. De manière préférée, cette séquence comprend la séquence SEQ ID NO : 8, ou une séquence présentant au moins 60%>, voire 70, 80, 85, 90, 95 ou même 99% d'identité avec la séquence SEQ ID NO : 8. Elle peut également comprendre la séquence SEQ ID NO : 7, avantageusement située en amont de la séquence codant 4CL, et/ou la séquence SEQ ID NO : 9, avantageusement située en aval de la séquence codant 4CL. Selon un autre mode de réalisation privilégié, ladite séquence code une enzyme BAS présentant la séquence SEQ ID NO : 20, ou une séquence protéique présentant au moins 70%), voire 80, 85, 90, 95 ou même 99% d'homologie ou d'identité avec la séquence SEQ ID NO : 20 et possédant une activité BAS. De manière préférée, cette séquence comprend la séquence SEQ ID NO : 11 , ou une séquence présentant au moins 60%>, voire 70, 80, 85, 90, 95 ou même 99% d'identité avec la séquence SEQ ID NO : 11. Elle peut également comprendre la séquence SEQ ID NO : 10 ou SEQ ID NO : 13, avantageusement située en amont de la séquence codant BAS, et/ou la séquence SEQ ID NO : 12 ou SEQ ID NO : 14, avantageusement située en aval de la séquence codant BAS. Selon un mode de réalisation particulier, le microorganisme fongique selon l'invention comprend au moins deux séquences hétérologues codant l'enzyme benzalacétone synthase (BAS), avantageusement provenant de la même source, encore plus avantageusement de même séquence codante mais éventuellement placées sous le contrôle de séquences régulatrices différentes.

Selon un autre mode de réalisation, les microorganismes fongiques visés par la présente invention ne présentent pas au moins l'une des activités suivantes : TAL, 4CL, BAS et/ou BAR. Selon un autre aspect, le microorganisme fongique selon l'invention comprend au moins une séquence hétérologue ou surnuméraire codant l'enzyme tyrosine ammonia lyase (TAL) ou benzalacétone réductase (BAR), avantageusement les enzymes TAL et BAR. Selon un mode de réalisation privilégié, ladite séquence code une enzyme TAL présentant la séquence SEQ ID NO : 18, ou une séquence protéique présentant au moins 70%, voire 80, 85, 90, 95 ou même 99% d'homologie ou d'identité avec la séquence SEQ ID NO : 18 et possédant une activité TAL. De manière préférée, cette séquence comprend la séquence SEQ ID NO : 5, ou une séquence présentant au moins 60%>, voire 70, 80, 85, 90, 95 ou même 99% d'identité avec la séquence SEQ ID NO : 5. Elle peut également comprendre la séquence SEQ ID NO : 4, avantageusement située en amont de la séquence codant TAL, et/ou la séquence SEQ ID NO : 6, avantageusement située en aval de la séquence codant TAL.

Selon un mode de réalisation privilégié, ladite séquence code une enzyme BAR présentant la séquence SEQ ID NO : 21, ou une séquence protéique présentant au moins 70%), voire 80, 85, 90, 95 ou même 99% d'homologie ou d'identité avec la séquence SEQ ID NO : 21 et possédant une activité BAR. De manière préférée, cette séquence comprend la séquence SEQ ID NO : 2, ou une séquence présentant au moins 60%>, voire 70, 80, 85, 90, 95 ou même 99% d'identité avec la séquence SEQ ID NO : 2. Elle peut également comprendre la séquence SEQ ID NO : 1 , avantageusement située en amont de la séquence codant BAR, et/ou la séquence SEQ ID NO : 3, avantageusement située en aval de la séquence codant BAR.

Selon un mode de réalisation particulier, les microorganismes fongiques visés par la présente invention comprennent au moins une séquence hétérologue codant les enzymes 4-coumarate:CoA ligase (4CL) et benzalacétone synthase (BAS), ainsi qu'au moins une séquence hétérologue ou surnuméraire codant l'enzyme tyrosine ammonia lyase (TAL) et benzalacétone réductase (BAR).

Une souche particulière de Saccharomyces cerevisiae présentant ces caractéristiques, et donc une voie de conversion de la tyrosine en frambinone fonctionnelle et adaptée aux applications visées, est la souche industrielle R 4, déposée auprès de la CNCM (Collection Nationale de Cultures de Microorganismes, Institut Pasteur, 25 rue du Docteur Roux, 75724 Paris Cedex 15) en date du 1 er Juin 2016, sous le numéro 1-5101. Celle-ci a été obtenue par intégration chromosomique, au niveau du locus HO de la souche déposée auprès de la CNCM en date du 4 Septembre 2008 sous le numéro 1-4071, de cassettes d'expression codant ces 4 enzymes, comme décrit ci-dessous (Exemples de réalisation). Une autre souche particulière de Saccharomyces cerevisiae, présentant ces mêmes caractéristiques, est la souche industrielle nommée R 5, déposée auprès de la CNCM en date du 26 avril 2017, sous le numéro 1-5199. Celle-ci a été obtenue à partir de la souche R 4, par excision du gène kanMX4 dans la cassette d'expression (voir les exemples de réalisation ci-dessous).

En rapport avec la voie de synthèse de la frambinone, les microorganismes fongiques selon l'invention peuvent subir d'autres modifications génétiques, telles que par exemple : tout moyen permettant d'instaurer ou d'augmenter la capacité du microorganisme à synthétiser de la frambinone à partir de phénylalanine, par exemple via l'introduction d'un gène codant une enzyme PAL. Comme déjà dit, les enzymes PAL sont proches des enzymes TAL décrites ci-dessus. Eventuellement, il peut être mis en œuvre une enzyme TAL présentant également une activité PAL. tout moyen permettant d'instaurer ou d'augmenter la capacité du microorganisme à convertir l'acide cinnamique en acide coumarique, par exemple via l'introduction d'un gène codant une enzyme C4H, éventuellement en combinaison avec un gène codant une enzyme CPR. tout moyen permettant d'augmenter la capacité du microorganisme à produire du malonyl-CoA, par exemple comme rapporté chez Y. lipolytica (Qiao et al., 2015, Metab. Eng. 29: 56-65) ou par la surproduction de l'Acétyl-CoA carboxylase

ACC1 chez S. cerevisiae (Shin et al., 2012, Enzyme Microb. Technol. 51, 211- 216).

Ainsi et selon un mode de réalisation particulier, le microorganisme mis en œuvre dans le cadre de l'invention comprend au moins une séquence hétérologue ou surnuméraire codant l'enzyme phénylalanine ammonia lyase (PAL) ou cinnamate 4-hydroxylase (C4H), avantageusement les enzymes PAL et C4H.

Selon une seconde caractéristique avantageuse, un microorganisme fongique visé par l'invention est affecté dans sa voie de dégradation de la tyrosine telle qu'illustrée à la Figure 2. Selon cette voie, appelé « voie de dégradation de la tyrosine en tyrosol » dans la suite de l'exposé, la tyrosine est convertie en p-hydroxyphényl acétaldéhyde, qui peut persister en l'état ou être converti soit en tyrosol soit en p-hydroxyphényl acétate. Ainsi et de manière avantageuse, un microorganisme fongique visé par l'invention présente une capacité faible ou une incapacité à dégrader ou à convertir la tyrosine en tyrosol, en p- hydroxyphényl acétaldéhyde et/ou en p-hydroxyphényl acétate. II a été mis en évidence, dans le cadre de la présente demande, que la voie de dégradation prédominante de la tyrosine dans les microorganismes fongiques d'intérêt était la voie de dégradation de la tyrosine en tyrosol, comme illustré à la Figure 2.

Cette capacité peut être évaluée comme décrit dans la partie « Exemples de réalisation » ci-dessous, en cultivant des microorganismes fongiques potentiellement d'intérêt pour la production de la frambinone, modifiés génétiquement ou pas, en présence de tyrosine et en suivant la production de tyrosol, par exemple par HPLC. Typiquement, un microorganisme peut s'avérer d'intérêt si dans les conditions décrites dans la partie expérimentale, à savoir dans des conditions de fermentation aérobie réalisée en milieu avantageusement minéral, par exemple composé de 1.7 g/L de YNB (Difco™), 5 g/L de sulfate d'ammonium, 2.7 g/L de phosphate de potassium et 20 g/L de dextrose, et contenant de la tyrosine, avantageusement à hauteur de 300 mg/L, la quantité de tyrosol produit est inférieure ou égale à 150 mg/L, avantageusement inférieure ou égale à 100 mg/L, voire à 50, 40, 30, 20 mg/L voire même 10 mg/L.

Alternativement et comme il ressort de la figure 2, des souches de microorganismes fongiques d'intérêt peuvent être sélectionnées sur la base de leur activité hydroxyphényl pyruvate décarboxylase (HPPDC), dont une méthode de mesure est détaillée dans les exemples de réalisation ci-dessous.

De manière avantageuse, l'activité HPPDC dans le microorganisme selon l'invention est inférieure ou égale à 2 x 10 "6 kat par g de protéine, avantageusement inférieure ou égale à lxlO "6 kat par g de protéine, voire même à 5 x 10 "7 kat par g de protéine. Dans le cadre de l'invention, il s'entend des protéines extraites du microorganisme.

Plus précisément, l'activité HPPDC mesurée dans un microorganisme selon l'invention est préférentiellement inférieure ou égale à 10 "5 kat par g de protéine, avantageusement inférieure ou égale à 5 x 10 "6 , 4 x 10 "6 , 3 x 10 "6 , 2 x 10 "6 , 1 x 10 "6 kat par g de protéine,

7 7 7 7 7

voire même inférieure ou égale à 9 x 10 " , 8 x 10 " , 7 x 10 " , 6 x 10 " , 5 x 10 " kat par g de protéine. Selon un mode de réalisation particulier, elle est inférieure ou égale à 4 x 10 "7 kat par g de protéine, avantageusement inférieure ou égale à 3 x 10 "7 kat par g de protéine, encore plus avantageusement inférieure ou égale à 2 x 10 "7 , 1,5 x 10 "7 , lx 10 "7 , voire 0,5x 10 "7 kat par g de protéine. Ainsi et selon l'invention, le microorganisme est sélectionné pour sa capacité faible voire nulle à dégrader la tyrosine, évaluée par exemple selon l'une des deux méthodes mentionnées ci-dessus. Comme déjà dit, cette sélection des microorganismes adaptés peut être réalisée avant ou après la modification génétique dudit microorganisme.

Selon un premier mode de réalisation, le microorganisme est sélectionné pour sa capacité naturelle à dégrader faiblement voire pas du tout la tyrosine en tyrosol, en p- hydroxyphényl acétaldéhyde et/ou en p-hydroxyphényl acétate.

Alternativement, un microorganisme d'intérêt, en particulier pour sa capacité à synthétiser de la frambinone, est soumis à des modifications génétiques de manière à diminuer voire à supprimer sa capacité à dégrader la tyrosine en tyrosol, en p- hydroxyphényl acétaldéhyde et/ou en p-hydroxyphényl acétate

Comme illustré à la figure 2, ceci peut être réalisé en inhibant ou en inactivant l'une des étapes assurant la transformation de la tyrosine en tyrosol, en p-hydroxyphényl acétaldéhyde et/ou en p-hydroxyphényl acétate, notamment l'étape de désamination, de décarboxylation, voire de réduction.

Comme déjà dit, différents moyens sont à la disposition de l'homme du métier pour réaliser cette inhibition ou inactivation par modification génétique du microorganisme, notamment l'insertion chromosomique d'éléments génétiques exogènes soit au niveau des régions régulatrices de manière à interférer avec l'expression du gène cible, soit au niveau de la séquence codante de manière à empêcher la production du produit du gène ou à entraîner la production d'une protéine tronquée et/ou inactive. Il est également possible de muter le gène cible au niveau des séquences critiques pour son expression ou son activité. Selon un mode de réalisation particulier, le gène cible est inactivé à l'aide d'une cassette capable d'exprimer un marqueur (Goldstein and McCusker, 1999, Yeast Chichester Engl. 15, 1541-53; Guldener et al, 2002, Nucleic Acids Res. 30, e23; Guldener et al, 1996, Nucleic Acids Res. 24, 2519-24.; Janke et al, 2004, Yeast 21, 947-62.; Sauer, 1987, Mol. Cell. Biol. 7, 2087-96), aux extrémités de laquelle les régions 5' et 3' du gène cible sont insérées de manière à permettre la recombinaison homologue et à remplacer la partie codante du gène par la cassette d'expression du marqueur. Selon un mode de réalisation avantageux, le microorganisme fongique selon l'invention est inactivé au niveau de l'activité impliquée dans la décarboxylation de l'hydroxyphényl pyruvate. En particulier et concernant S. cerevisiae, au moins 3 gènes ont été décrits comme étant impliqués dans cette activité, en l'occurrence ARO10, PDC5 et PDC6 (Hazelwood et al., 2008; Appl. Environ. Microbiol. 74, 2259-66 ; Kneen et al., 2011, FEBS J. 278, 1842-53; Vuralhan et al, 2005, Appl. Environ. Microbiol. 71, 3276-84. ; Vuralhan et al., 2003, Appl. Environ. Microbiol. 69, 4534-41). Avantageusement, au moins l'un des gènes codant la phénylpyruvate décarboxylase ArolO, la pyruvate décarboxylase Pdc5 et la pyruvate décarboxylase Pdc6 est inactivé. Selon un mode de réalisation particulier, les gènes codant la phénylpyruvate décarboxylase ArolO, la pyruvate décarboxylase Pdc5 et la pyruvate décarboxylase Pdc6 sont inactivés.

Alternativement, la ou les désaminases impliquées dans la première étape de la voie de dégradation de la tyrosine sont inactivées. En relation avec S. cerevisiae, il peut s'agir de la désaminase Aro8 et/ou de la désaminase Aro9, ou de leurs homologues dans les autres microorganismes fongiques.

De même, la ou les alcool déshydrogénases (notées ADH) impliquées dans la troisième étape de la voie de dégradation de la tyrosine en tyrosol peuvent être ciblées.

Ainsi et selon un aspect particulier, la présente invention vise un microorganisme fongique comprenant au moins une mutation ou délétion dans au moins un des gènes codant les enzymes suivantes : désaminase Aro8, désaminase Aro9, décarboxylase ArolO, décarboxylase Pdc5, décarboxylase Pdc6, alcool déshydrogenase (ADH). Dans le cadre de l'invention, lesdites mutations et/ou délétion entraînent une diminution voire une suppression de la capacité du microorganisme à dégrader la tyrosine en tyrosol, en p- hydroxyphényl acétaldéhyde et/ou en p-hydroxyphényl acétate. De manière avantageuse, ledit microorganisme présente également une capacité à synthétiser de la frambinone à partir de tyrosine, éventuellement grâce à l'introduction de modifications génétiques comme décrites ci-dessus.

Selon un mode de réalisation particulier, un tel microorganisme est une souche de Saccharomyces cerevisiae qui présente une capacité à produire de la frambinone et une inactivation du gène ARO10 codant une décarboxylase. Ce microorganisme possède donc une voie de conversion de la tyrosine en frambinone fonctionnelle et une capacité faible ou une incapacité à dégrader la tyrosine en tyrosol, en p-hydroxyphényl acétaldéhyde et/ou en p-hydroxyphényl acétate comme décrit ci-dessus. Il s'agit par exemple de la souche industrielle nommée R 8, déposée auprès de la CNCM en date du 26 avril 2017, sous le numéro 1-5200. Celle-ci a été obtenue à partir de la souche R 5, par insertion d'une cassette permettant l'inactivation du gène ARO10 (voir les exemples de réalisation ci-dessous).

Selon un autre aspect, la présente invention concerne l'utilisation d'un microorganisme fongique présentant la capacité à produire de la frambinone à partir de tyrosine et une capacité faible ou une incapacité à dégrader la tyrosine en tyrosol, en p-hydroxyphényl acétaldéhyde et/ou en p-hydroxyphényl acétate, avantageusement comme décrit ci-dessus et notamment la souche 1-5200, pour la production de frambinone, avantageusement par fermentation aérobie.

En d'autres termes, l'invention concerne également un procédé de production de frambinone comprenant la culture d'un microorganisme fongique présentant la capacité à produire de la frambinone à partir de tyrosine et une capacité faible ou une incapacité à dégrader la tyrosine en tyrosol, en p-hydroxyphényl acétaldéhyde et/ou en p- hydroxyphényl acétate, avantageusement comme décrit ci-dessus et notamment la souche 1-5200, dans un milieu comprenant de la tyrosine. Selon un mode de réalisation particulier, la tyrosine est ajoutée dans le milieu de culture à une concentration comprise entre 50 et 450 ou 500 mg/L, par exemple de l'ordre de 300 mg/L. Eventuellement, le milieu de culture peut également être supplémenté en acide coumarique et/ou en phénylalanine.

Alternativement, le microorganisme mis en œuvre dans le cadre de l'invention présente naturellement une certaine capacité à dégrader la tyrosine en tyrosol, en p-hydroxyphényl acétaldéhyde et/ou en p-hydroxyphényl acétate, mais cette voie de dégradation est inhibée par l'ajout d'un répresseur de cette voie, par exemple un inhibiteur de l'une des enzymes impliquées dans cette voie. Ainsi et selon un autre aspect, l'invention vise un procédé de production de frambinone comprenant la culture d'un microorganisme fongique présentant une capacité à produire de la frambinone à partir de tyrosine dans un milieu comprenant de la tyrosine et au moins un répresseur de la voie de dégradation de la tyrosine en tyrosol, en p- hydroxyphényl acétaldéhyde et/ou en p-hydroxyphényl acétate. Eventuellement, il s'agit d'un microorganisme modifié génétiquement pour conférer ou augmenter la capacité dudit microorganisme à produire de la frambinone à partir de tyrosine, comme décrit ci- dessus. Selon un mode de réalisation particulier, le microorganisme mis en œuvre est la souche industrielle Saccharomyces cerevisiae RK4, déposée auprès de la CNCM (Collection Nationale de Cultures de Microorganismes, Institut Pasteur, 25 rue du Docteur Roux, 75724 Paris Cedex 15) en date du 1 er Juin 2016 sous le numéro 1-5101.

Alternativement, le microorganisme mis en œuvre est la souche industrielle Saccharomyces cerevisiae R 5, déposée auprès de la CNCM (Collection Nationale de Cultures de Microorganismes, Institut Pasteur, 25 rue du Docteur Roux, 75724 Paris Cedex 15) en date du 26 Avril 2017 sous le numéro 1-5199.

Selon un mode de réalisation particulier, le répresseur de la voie de dégradation de la tyrosine en tyrosol, en p-hydroxyphényl acétaldéhyde et/ou en p-hydroxyphényl acétate est choisi parmi le glutamate, la glutamine ou un de leurs dérivés, avantageusement le glutamate. Selon un mode de réalisation particulier, ce répresseur, en particulier le glutamate, est ajouté dans le milieu de culture à une concentration supérieure ou égale à 0,5 g/L, voire 1, 2 ou 3 g/L, par exemple de l'ordre de 2 g/L.

Dans le cadre de l'invention, le microorganisme fongique est mis en culture dans des conditions favorisant la production de frambinone. Des conditions particulièrement adaptées de culture sont les suivantes :

en aérobiose ;

dans un milieu de croissance permettant la fermentation, avantageusement un milieu minéral, par exemple composé de 1.7 g/L de YNB (Difco™), 5 g/L de sulfate d'ammonium, 2.7 g/L de phosphate de potassium et 20 g/L de dextrose ; - pendant une durée pouvant aller de plusieurs heures à plusieurs jours ;

à un pH compris entre 5 et 7, par exemple égal à 6 ;

à une température comprise entre 25°C et 32°C, par exemple égale à 30°C.

Comme déjà dit et dans ces conditions, il a été observé des niveaux de production de frambinone encore jamais atteints, le milieu de culture présentant une concentration en frambinone avantageusement supérieure à 4 mg/L, encore plus avantageusement supérieure ou égale à 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11 , 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19 voire même 20, 25 ou 30 mg/L. De manière connue de l'homme du métier, la frambinone ainsi produite peut être isolée du milieu de culture. L'invention va être décrite plus en détail dans les exemples de réalisation qui suivent à l'appui des figures annexées. Ces exemples sont fournis uniquement pour illustrer l'invention et n'ont aucune portée limitative.

Il est considéré que sans plus de précision, l'homme du métier sera capable, au vu de la description et des exemples de réalisation de mettre en œuvre et d'utiliser les microorganismes selon l'invention et les méthodes revendiquées.

LEGENDES DES FIGURES

Figure 1: Voie de biosynthèse de la frambinone

(1) L-tyrosine (2) acide p-coumarique (3) coumaroyl-CoA (4) p-hydroxy benzalacétone (5) frambinone (6) malonyl-CoA (7) phénylalanine (8) acide cinnamique

TAL: tyrosine ammonia lyase, 4CL: 4-coumarate-CoA ligase, BAS: benzalacétone synthase, BAR: benzalacétone réductase, PAL: phénylalanine ammonia lyase, C4H: cinnamate 4 hydroxylase

Figure 2: Voie de dégradation de la tyrosine

Elle consiste en des étapes de désamination (Aro8/9) et de décarboxylation (Arol0/Pdc5/Pdc6), aboutissant à la formation de p-hydroxyphényl acétaldéhyde. Celui- ci peut être réduit à l'aide d'une alcool déshydrogénase (ADH) en tyrosol ou oxydé en p- hydroxyphényl acétate. Une inactivation possible de la voie est indiquée par une croix.

Figure 3: Schéma du locus HO modifié dans le génome des souches S. cerevisiae RK4, RK5 et RK8 et la cassette permettant de modifier le locus ARO10

A) Schéma des cassettes intégrées au locus HO permettant la synthèse de frambinone. Cinq cassettes d'expression génique et une cassette marqueur ont été intégrées au niveau du locus HO en utilisant différentes régions de recombinaison chevauchantes (RR1-5) entre les cassettes pour l'assemblage in vivo. Dans les souches R 5 et R 8 la cassette marqueur (pTEF-KanMX-tTEF) est absente.

B) Schéma de la cassette permettant l'inactivation du gène ARO10 et conférant une résistance à l'hygromycine.

Figure 4: Production de frambinone par la souche S. cerevisiae RK4 après 7 jours La concentration en frambinone (en mg/L) a été déterminée après 7 jours de culture en fonction du substrat (tyrosine synthétisée par la cellule à partir de glucose et de sulfate d'ammonium (dite obtention de novo), tyrosine ou acide coumarique ajoutés dans le milieu de culture). Figure 5: Production de tyrosol par la souche S. cerevisiae RK4 après 7 jours

La concentration en tyrosol (en mg/L) a été déterminée après 7 jours de culture en fonction du substrat (tyrosine synthétisée par la cellule à partir de glucose et de sulfate d'ammonium (dite obtention de novo), tyrosine ou acide coumarique ajoutés dans le milieu de culture).

Figure 6: Activité HDPPC dans des extraits cellulaires (souche S. cerevisiae RK4, RK5 et RK8) après 16 heures de fermentation en milieu synthétique contenant de la tyrosine avec ou sans glutamate

L'activité hydroxy-phénylpyruvate (HDPPC) (exprimée en nmol/min/mg de protéine) a été déterminée dans l'extrait cellulaire après 16 heures de fermentation en milieu synthétique contenant 0.3 g/L de tyrosine et de manière optionnelle 2 g/L de glutamate.

EXEMPLES DE REALISATION

La présente invention va être illustrée plus avant en rapport avec une souche de Saccharomyces cerevisiae modifiée génétiquement pour exprimer 4 gènes hétérologues codant les enzymes TAL, 4CL, BAS et BAR intégrés au niveau de son locus HO et produisant efficacement de la frambinone à partir de tyrosine dans un milieu supplémenté en glutamate, ou avec une souche dérivée présentant un gène ARO10 inactivé. Toutefois, ces exemples ne sont en aucun cas limitatifs.

Il Matériel et Méthodes Génération des cassettes d'expression et des souches recombinantes

Pour synthétiser de la frambinone à partir de tyrosine, il a été choisi d'exprimer quatre gènes hétérologues chez Saccharomyces cerevisiae comme montré dans le Tableau 4 ci- dessous: Tableau 4: Gènes hétérologues utilisés pour établir une voie de synthèse de la frambinone chez S. cerevisiae

Enzyme Source Référence Séquence (codon-optimisée pour l'expression chez S. cerevisiae)

TAL Rhodotorula Uniprot SEQ ID NO: 5

glutinis PI 1544

4CL Ara bi do psi s Uniprot SEQ ID NO: 8

thaliana Q42524 BAS Rheum Uniprot SEQ ID NO: 1 1 palmatum Q94FV7

BAR Rubus idaeus Uniprot SEQ ID NO: 2

G1FCG0

Les séquences codantes ont été « codon-optimisées » pour l'expression chez S. cerevisiae. Les séquences correspondantes sont indiquées dans le Tableau 4 ci-dessus.

Elles ont été clonées entre des promoteurs et des terminateurs individuels pour assurer leur expression. Cinq cassettes d'expression génique ont été construites (Tableau 5 ci- dessous) et, en plus d'une cassette marqueur, ont été intégrées dans le génome de la souche industrielle S. cerevisiae déposée auprès de la CNCM en date du 4 Septembre 2008 sous le numéro 1-4071 , au niveau du locus HO en utilisant la technique d'intégration modulaire de cassette (Figure 3A). La souche résultante, appelée R 4, a été déposée auprès de la CNCM (Collection Nationale de Cultures de Microorganismes, Institut Pasteur, 25 rue du Docteur Roux, 75724 Paris Cedex 15) en date du 1 er Juin 2016, sous le numéro 1-5101.

Tableau 5 : Cassettes d'ex ression éni ue et mar ueur utilisés dans la souche R 4

* de S. cerevisiae à l'exception de TEF1 (dc Ashbya gossypii)

Ri = Rubus idaeus

Rg = Rhodotorula glutinis

Ai = Arabidopsis thaliana

Rp = Rheum palmatum A partir de la souche RK4 décrite ci-dessus, la souche R 5 a été obtenue par élimination de la cassette marqueur kanMX. Ceci a été réalisé par expression de la Cre recombinase qui entraine l'excision du marqueur kanMX qui est flanqué de sites loxP (Steensma et Linde, 2001, Yeast, 18(5) : 469-72). Il s'agit de la souche déposée auprès de la CNCM en date du 26 avril 2017, sous le numéro 1-5199.

Une cassette d'inactivation du gène ARO10 a ensuite été construite (Figure 3B). Elle est composée d'une cassette marqueur à l'hygromycine, pTEFlshort-hph-tTEFl (pTEFl short: SEQ ID NO: 22; hph: SEQ ID NO: 23; tTEFl : SEQ ID NO: 24), flanquée de séquences homologues au promoteur (pAROlO : SEQ ID NO : 25) et au terminateur (tAROlO; SEQ ID NO : 26) de ARO10, en amont et en aval, respectivement. Une séquence ARN guide, spécifique du gène ARO10, a été clonée dans un plasmide permettant d'exprimer Cas9p et ledit ARN chez S. cerevisiae. La souche R 5 décrite ci-dessus a été cotransformée avec ce plasmide et la cassette d'inactivation du gène ARO10. Les clones positifs (résistants à l'hygromycine) ont été sélectionnés et vérifiés pour l'inactivation de tous les allèles de ARO10.

La souche RK8 ainsi obtenue a été déposée auprès de la CNCM en date du 26 avril 2017, sous le numéro 1-5200.

Mesure par HPLC des intermédiaires et des produits de la voie

La frambinone, le tyrosol et les autres intermédiaires de la voie ont été analysés et quantifiés par deux méthodes de HPLC appelées « méthode longue » et «ACE 29 », respectivement. Les dispositifs de HPLC et leurs paramètres sont résumés dans le Tableau 6 ci-dessous et permettent la séparation de la frambinone et du tyrosol des autres composés. Pour la quantification, une calibration a été réalisée à l'aide de solutions standards entre 0.1 and 300 mg/L. Les échantillons des cultures de levure ont été centrifugées (>15000x g, 10 min) et le surnageant a été filtré à travers un filtre de 0.45 μιη avant injection dans l'HPLC. Tableau 6: Dispositifs d'HPLC et paramètres

Détection enzymatique de l'activité hydroxyphényl pyruvate décarboxylase (HPPDC) Pour quantifier l'activité enzymatique de la décarboxylation de Γ hydroxyphényl pyruvate (activité HPPDC), un test enzymatique couplé avec un extrait cellulaire brut a été mis au point. L'extrait cellulaire a été préparé à partir d'une culture sur la nuit (16h) de la souche d'intérêt dans un milieu synthétique composé de 1.7 g/L de YNB (Difco™), 5 g/L de sulfate d'ammonium, 2.7 g/L de phosphate de potassium et 20 g/L de dextrose. Le milieu a en outre été complété par 300 mg/L de L-tyrosine et optionnellement différentes sources d'azote (par exemple le L-glutamate). Après croissance aérobie à 30°C, les cellules ont été récoltées par centrifugation (5000x g, 4 min, 4°C) et lavées deux fois dans un tampon de lavage (10 mM phosphate de potassium, 2 mM EDTA, pH 6.8). Le culot cellulaire a été repris dans un tampon d'extraction (100 mM phosphate de potassium, 2 mM de chlorure de magnésium, 1 mM DTT, lx cOmplete™ proteinase inhibitors, pH 6.8) et les cellules ont été cassées à l'aide d'un disrupteur « FastPrep disruptor » (avec des billes de verre de diamètre 0.45 mm; quatre cycles de 30 s à 6 m/s et 1 min sur la glace). Les débris cellulaires ont été éliminés par centrifugation et le surnageant a été utilisé comme extrait cellulaire brut. La concentration en protéines a été déterminée à l'aide du kit « Uptima BC Assay Protein Quantification kit » selon les instructions du fabricant. L'essai enzymatique a été réalisé comme décrit par Kneen et al. (2011, FEBS J. 278, 1842-53), avec des modifications mineures. L'essai couple la réaction HPPDC (décarboxylation de l'hydroxyphényl pyruvate (HPP) en hydroxyphényl acétaldéhyde) avec une seconde réaction (oxydation de l'hydroxyphényl acétaldéhyde en hydroxyphényl éthanol/Tyrosol) catalysée par l'enzyme auxiliaire alcool déshydrogénase (ADH). L'activité ADH mène à une réduction du NADH en NAD + qui peut être suivie grâce à la diminution de l'absorption à 340 nm dans un spectrophotomètre. Le mélange réactionnel (1 ml) contenait 100 mM de phosphate de potassium, 1 mM de chlorure de magnésium, 0.5 mM de thiamine pyrophosphate, 0.1 mM de NADH, 0.5 U d'ADH de foie de cheval, 4 mM de HPP et de l'extrait cellulaire brut équivalent à approximativement 200 μg de protéines totales. Les réactions ont été mesurées à 32°C et à pH 6.8. La réaction a été initiée par l'ajout du substrat HPP.

II/ Résultats

1/ Production de frambinone et d'autres métabolites à partir de tyrosine ou d'acide coumarique en tant que substrat par la souche RK4.

Les tests de fermentation ont été réalisés avec la souche R 4 cultivée dans un milieu minéral, composé de 1.7 g/L de YNB (Difco™), 5 g/L de sulfate d'ammonium, 2.7 g/L de phosphate de potassium et 20 g/L de dextrose. Optionnellement, le milieu peut contenir 300 mg/L de tyrosine ou 100 mg/L d'acide coumarique. Comme proposé par Lee et al. (2016, Microb. Cell Factories 15. doi: 10.1186/sl2934-016-0446-2), les tests de fermentation ont été réalisés en conditions aérobies pour optimiser la production de frambinone.

Comme montré à la figure 4, la souche R 4 peut synthétiser environ 6 mg/L de frambinone à partir de tyrosine. Lorsque l'acide coumarique est utilisé comme substrat, la concentration en frambinone dans les milieux atteint approximativement 14 mg/L. Ces résultats sont en accord avec ceux de l'art antérieur et confirment le fait que la production de frambinone à partir d'acides aminés aromatiques est moins performante qu'à partir d'acide coumarique. Toutefois, en prenant en compte le prix du substrat utilisé pour la bioconversion, les applications industrielles sont plus bénéfiques lorsque la tyrosine est utilisée plutôt que l'acide coumarique.

Un dernier point de ces résultats concerne la synthèse de novo de frambinone par la souche construite R 4. Il est à noter que la concentration en frambinone est plus ou moins la même que celle observée en présence de tyrosine. L'hypothèse a été faite que cela est probablement lié à la régulation de la bio synthèse de la tyrosine par la tyrosine extracellulaire mais aussi au détournement de cet acide aminé par une voie de dégradation.

2/ Dégradation de la tyrosine en tyrosol dans la souche RK4

La dégradation de la tyrosine en tyrosol est une voie de dégradation bien connue (Figure 2) (Hazelwood et al., 2008, Appl. Environ. Microbiol. 74, 2259-66). La première étape consiste en une transamination de la tyrosine menant à la formation d'hydroxyphényl pyruvate. Ce composé est alors décarboxylé en hydroxyphényl acétaldéhyde (EC: 4.1.1.80). Finalement, la fonction aldéhyde est réduite pour former une molécule hydroxylée appelée tyrosol (EC : 1.1.1.90).

La production de tyrosol pendant la fermentation de la souche R 4 a été suivie. La Figure 5 révèle les concentrations en tyrosol dans les différents milieux après 7 jours de fermentation. Les résultats confirment que la majeure partie de la tyrosine fournie est utilisée pour la production de tyrosol.

3/ Inhibition de l'activité de P hydroxyphényl pyruvate décarboxylase (HPPDC). Pour réduire la production de tyrosol dans la souche R 4, il a été décidé d'inhiber l'activité enzymatique impliquée dans la décarboxylation de Γ hydroxyphényl pyruvate, en ajoutant dans le milieu de fermentation des composés qui diminue l'activité HPPDC.

Il a été choisi d'ajouter du glutamate dans le milieu pour réduire l'activité HPPDC. Pour être sûr que l'addition de cet acide aminé supplémentaire entraine une réduction de l'activité enzymatique, le test enzymatique a été mis en œuvre comme décrit ci-dessus. La Figure 6 montre l'activité dans l'extrait cellulaire de R 4 après culture dans le milieu de fermentation contenant de la tyrosine avec ou sans 2 g/L de glutamate. Les résultats confirment la diminution de l'activité HPPDC dans les cellules fermentant en présence de glutamate.

En parallèle, l'activité HPPDC de la souche R 8 a été mesurée. On constate à la figure 6 que la délétion du gène ARO10 codant pour la décarboxylase permet de diminuer l'activité HPPDC, dans les mêmes proportions que pour la souche RK4 en présence de glutamate.

La figure 6 révèle également que, de manière attendue, les souches R 4 et R 5 (dont dérive la souche R 8) ont le même niveau d'activité HPPDC en présence de tyrosine. 4/ Impact de l'inhibition de la dégradation de la tyrosine sur la production de frambinone et de tyrosol Dans une première série d'expériences, la production de tyrosol et de frambinone par la souche R 4 a été suivie par HPLC (« méthode longue ») dans les deux conditions (avec ou sans glutamate). Les concentrations de tyrosol observées démontrent que la réduction de l'activité HPPDC réduit aussi la formation de tyrosol: une réduction de 27% de la concentration en tyrosol a été observée en réponse au glutamate, en accord avec la réduction de l'activité HPPDC. Dans le même temps, la production de frambinone a augmenté de 40%. Ces données suggèrent fortement que la réduction de l'activité HPPDC réduit la production de tyrosol, rendant ainsi la tyrosine plus disponible pour la voie de la frambinone. Dans une seconde série d'expériences, la détermination des niveaux de frambinone (Tableau 7) et de tyrosol (Tableau 8) produits par les trois souches de S. cerevisiae construites (R 4, R 5 et RK8) a été évaluée par HPLC selon les deux méthodes décrites (« méthode longue » et « ACE 29 »). La méthode ACE 29 utilise une nouvelle génération de colonne qui permet d'augmenter la séparation et résolution des composés, et ainsi de diminuer les risques de co-élution, notamment de la frambinone, avec d'autres composés en comparaison avec la « méthode longue ».

Les résultats obtenus avec la « méthode longue » à partir d'une fermentation dans un milieu de culture contenant du glutamate montrent une augmentation de la synthèse de frambinone par la souche RK5 (+ 58%) en comparaison avec une fermentation dans un milieu de culture en absence de glutamate, équivalente à celle de la souche R 4 dans les mêmes conditions. Les augmentations observées sont également proches des valeurs de la première série d'expériences. La production de frambinone par la souche R 8, cultivée en l'absence de glutamate, a été comparée à celle de la souche R 5 dans les mêmes conditions. Une augmentation de la synthèse de frambinone de + 36%>, du même ordre que celle observée pour les souches R 4 et R 5 cultivées en présence de glutamate, a été observée. La détermination des niveaux de synthèse de frambinone par les souches R 4, R 5 et R 8 par la méthode ACE 29 démontre de la même manière une augmentation de la production de frambinone, dans des proportions toutefois supérieures, à savoir + 100%), + 95%o et + 129 %>, respectivement. Tableau 7 : Détermination par HPLC de la concentration en frambinone à l'issue de la fermentation par les différentes souches construites dans des milieux sans (Glu-) et avec (Glu+) glutamate.

n.d. : non déterminé

MD : écart moyen

Les résultats obtenus avec la « méthode longue » à partir d'une fermentation dans un milieu de culture contenant du glutamate montrent une diminution de la synthèse de tyrosol par la souche RK5 (- 20%) par rapport à une fermentation en absence de glutamate, comparable à celle de la souche R 4 dans les mêmes conditions. Les diminutions observées sont également proches des valeurs de la première série d'expériences. La production de tyrosol par la souche R 8, cultivée en l'absence de glutamate, a été comparée à celle de la souche R 5 dans les mêmes conditions. Une diminution de la synthèse de tyrosol de - 49%, du même ordre que celle observée pour les souches R 4 et R 5 cultivées en présence de glutamate, a été observée. La détermination des niveaux de synthèse de tyrosol par les souches R 4, R 5 et R 8 par la méthode ACE 29 démontrent de la même manière une diminution de la production de tyrosol, dans des proportions similaires, à savoir - 19%, - 19%> et - 52 %>, respectivement . Tableau 8 : Détermination par HPLC de la concentration en tyrosol à l'issue de la fermentation par les différentes souches construites dans des milieux sans (Glu-) et avec (Glu+) glutamate.

n.d. : non déterminé

MD : écart moyen III/ Conclusions: En conclusion, l'introduction de la voie de la frambinone comme montrée dans la Figure 1 est suffisante pour la production par S. cerevisiae de frambinone à partir de tyrosine. Cependant, lorsque de la tyrosine est ajoutée dans le milieu de fermentation, la bioconversion n'est pas très efficace et mène à la production d'une grande quantité de coproduits, essentiellement du tyrosol comme rapporté ci-dessus. Pour réduire le « détournement » du substrat, l'activité HPPDC impliquée dans la dégradation de la tyrosine en tyrosol a été réduite avec succès par l'ajout d'un inhibiteur de ladite activité enzymatique ou l'inactivation du gène ARO10. Comme rapporté, cela a permis d'augmenter la production de frambinone. Alternativement, d'autres stratégies peuvent être mises en œuvre comme la sélection d'une souche microbienne présentant une très faible activité HPPDC, basée sur un fond génétique naturel ou via l'introduction d'autres modifications génétiques telles que la délétion des gènes codant les enzymes HPPDC.